Bouches-du-Rhône 25/05/2023
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Rousset

Accumuler les expériences pour multiplier les perspectives

Mécanicien de métier, Emmanuel Triffault démarre dans le secteur agricole. Il a bénéficié d'un dispositif contribuant à la gestion du territoire et qui s'est avéré, pour lui, un tremplin à son installation.

Emmanuel Triffault en plein ébourgeonnage de sa parcelle de cinsault à La Barque.

© Crédit photo : ED

Jongler avec plusieurs activités n'est pas nouveau dans le monde agricole. Mais la tendance s'observe peut-être de plus en plus. Pour certains, c'est l'attractivité de la vie rurale qui les a conduits, sur le tard, à opter pour un changement de vie. Pour d'autres, c'est tout simplement le désir de se reconvertir, de tourner la page et d'embrasser un métier qui a du sens. Mais la pluriactivité est aussi le moyen, pour les plus jeunes, de démarrer dans la vie professionnelle, en maximisant leurs chances de réussir à s'installer durablement. Pour Emmanuel Triffault, 34 ans, c'est un peu toutes ces raisons à la fois qui l'ont conduit à rejoindre l'agriculture.

Dans sa famille, elle n'est pourtant présente que de manière lointaine. Ses arrière-grands-parents étaient agriculteurs en Normandie. Le jeune homme - qui vit en Provence depuis qu'il a une dizaine d'années - doit cependant sa toute première expérience professionnelle à la vigne. Un job d'été qui le marque, et dont il retient surtout la dureté du travail de la terre. "Je me suis dit, à l'époque, que jamais je ne ferais ça", se souvient-il. Ce dernier suit un parcours scolaire classique, qui le mène jusqu'à un bac littéraire. Mais, à 18 ans, il aspire à se confronter au monde du travail et la mécanique le passionne. Il apprend à réparer des voitures, passe un BEP et enchaîne différents jobs dans l'automobile. "Des expériences qui ne se sont pas toujours bien passées, notamment à cause du facteur humain, de la manière de travailler", explique Emmanuel, qui prend alors conscience qu'il lui sera difficile de trouver sa voie dans le monde de l'entreprise. La lumière des néons ne lui convient plus et il se rend compte que "les relations avec les plantes sont sûrement aussi plus simples que celles avec les humains". Un constat qui va finalement le pousser à envisager tout autre chose.

"Je suis d'abord passé par le bûcheronnage dans la Drôme, mais sans grande conviction", rapporte le jeune homme. Un ami qui travaillait dans la vigne chez un agriculteur, du côté de Rousset, lui fait part de son quotidien et des opportunités existant dans le secteur. Emmanuel, alors demandeur d'emploi, n'hésite pas. Il redécouvre le travail de la terre, mais avec un tout autre œil cette fois. Il travaille, ici et là, dans différentes exploitations viticoles, en restant toutefois conscient qu'il a le plus de compétences dans la mécanique.

Mécanicien à domicile

Il décide alors de monter une activité de réparation mécanique à domicile, par le biais d'une auto-entreprise, histoire de s'assurer un revenu en étant à son compte. Il vient de boucler son 6e exercice. "L'activité marche bien, les clients sont contents et je travaille surtout par le bouche-à-oreille", indique-t-il. L'exemple d'amis autour de lui qui parviennent à démarrer dans la vigne le titille quand même. "Maintenant que j'avais touché à l'indépendance, je me disais que, si j'avais la possibilité de faire la même chose dans l'agriculture, ce serait super." Emmanuel commence alors à chercher des terres. Le réseau qu'il a commencé à tisser dans le secteur de Rousset lui permet de trouver une première parcelle en fermage : un hectare de cinsault conduit en bio du côté de La Barque. La vigne est établie certes, mais il y a beaucoup de manquants à cause de l'Esca. En travaillant bien la parcelle, il espère pouvoir atteindre six tonnes de raisins, apportées à la cave coopérative de Rousset. Il l'exploite désormais depuis trois ans.

Poursuivant sur cette lancée, il récupère ensuite la gestion d'oliviers situés dans le parc de Roques-Hautes, une propriété foncière du Département des Bouches-du-Rhône. Positionné au cœur d'enjeux naturalistes, de préservation de la biodiversité et de protection contre les incendies, ce site sensible a fait l'objet de nombreuses interventions et aménagements de la part du Conseil départemental. Une coupure agricole à vocation DFCI y a été créée sur la base d'anciennes terrasses, et une oliveraie s'y étend sur 14 ha, entre Le Tholonet, Beaurecueil et Saint-Antonin-sur-Bayon. Depuis une quinzaine d'années, le Département en confiait la gestion à un agriculteur, qui a dû récemment stopper son activité. Le Département a alors mandaté la Chambre d'agriculture pour lancer un nouvel appel à candidatures, afin de sélectionner de nouveaux agriculteurs. Emmanuel postule dans le cadre d'une candidature conjointe avec Olivier De Cambiaire, un oléiculteur qui a repris, il y a quelques années, le Moulin de Rousset. Ensemble, ils ont été choisis pour l'entretenir et l'exploiter.

Une convention d'exploitation sur dix ans

Emmanuel Triffault a la gestion de quatre hectares depuis l'année dernière. Des parcelles géographiquement regroupées et irriguées, qui lui suffisaient pour s'installer au titre de jeune agriculteur. La convention avec le Conseil départemental portera sur dix ans, durant lesquels il va continuer à se consacrer à l'exploitation des parcelles, dans le respect du cahier des charges de l'Agriculture biologique.

Il va confier la trituration de ses olives au Moulin Les Cengles, à Rousset. Il pourra cependant récupérer son huile pour la commercialiser sous les labels AB et Appellation d'origine protégée Huile d'Aix-en-Provence. "La première récolte a été anecdotique et celle de la campagne 2023 devrait être plus volumineuse. La culture de l'olivier est très plaisante, différente de celle de la vigne, mais aussi très complémentaire pour le calendrier des travaux aux champs", observe Emmanuel.

Quand il regarde derrière lui, il ne regrette pas d'avoir pris le temps de poser ces pierres successives pour véritablement démarrer dans ce nouveau métier. La mécanique auto reste tout de même encore pour lui une assurance de revenus. Cette première passion lui a permis de s'installer progressivement. La suite, le jeune homme l'envisage autour de la vigne et de l'olivier. "Mon souhait est de pouvoir tirer 90 % de mes revenus de l'agriculture et de conserver l'activité de mécanique à domicile comme de l'appoint, puisque j'aime ça", confie-t-il. En attendant, il recherche deux hectares de vignes supplémentaires, pour trouver l'équilibre et viabiliser ses activités. 

Emmanuel Delarue •

Les DATES et CHIFFRES clés

Le mécanicien à domicile est auto-entrepreneur depuis 6 ans

Il s'est installé jeune agriculteur en 2022

Il exploite aujourd'hui hectare de vigne et 4 ha d'oliviers

Il cherche actuellement ha de vigne supplémentaire

Emmanuel Delarue •

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