Guillaume Lefèvre (en haut, 2e à droite) et son équipe, aux commandes du Domaine de Sulauze (© J. Dukmedjian).
“Nous sommes passés, en 20 ans, des bars à vins natures aux grandes tables étoilées” : le succès d’un domaine viticole se mesure parfois à certains détails, comme la typologie de ses acheteurs. Dans le cas de Guillaume Lefèvre, le propriétaire du Domaine de Sulauze, cette évolution récompense des années de travail à restructurer le vignoble, créer et positionner une gamme de vins, et valider des choix de culture risqués. Le désormais quadragénaire a quasiment fait table rase, en 2004, au moment de la reprise du domaine situé à Miramas et qui s’appelait encore Château Sulauze. Sur les 46 hectares de vignes existants, il en arrache 25 ha l’année suivante, replante et densifie les pieds dans les parcelles, pour arriver deux décennies plus tard à 30 ha.
Si Guillaume Lefèvre a pris racine ici, c’est presque par accident. Employé au Domaine des Masques, il se positionne pour le racheter en 2003, lorsque celui-ci est mis en vente. Sans succès. Le dossier du jeune homme est ensuite retenu par la commission d’attribution de la Safer qui chapeaute alors la vente de terres, dans le cadre d’une succession. Le vignoble appartenait aux Fano, “une grande famille d’éleveurs de taureaux qui a choisi de se recentrer sur leur cœur de métier” commente Guillaume Lefèvre. S’il n’est pas issu du milieu agricole, ce dernier a “toujours voulu travailler dans la vigne et le vin” et a poursuivi des études dans ce sens au lycée Valabre, à Gardanne. Une vocation un peu hors-norme pour ce descendant, par sa mère, d’une grande famille marseillaise d’armateurs et de négociants, pour une part ; et d’un grand-père architecte et promoteur immobilier, concepteur notamment de la Tour Méditerranée ou du Cercle des nageurs, à Marseille. C’est ce dernier qui l’aide à racheter Sulauze et à le transformer, avec succès, “dans une démarche d’investissement patrimonial” précise Guillaume Lefèvre.
“Un écosystème vertueux”
Les débuts sont pourtant rudes, avant d’y parvenir : “J’avais 26 ans au moment de la reprise du domaine, et déjà six ans d’expérience acquise dans des exploitations viticoles, sur la partie vinification notamment. Les rapports avec l’équipe d’une dizaine de salariés en place n’ont pas été simples : on me prenait clairement pour un ‘Parisien’. Il a fallu m’imposer, faire accepter mes méthodes et ma vision” se souvient Guillaume Lefèvre, qui entame la conversion du vignoble vers la bio et la biodynamie un an plus tard, en 2005.
Près de 15 ans après la double certification, ses convictions en faveur de ce mode de conduite de l’exploitation n’ont pas bougé d’un iota. Il envisage toujours son domaine – qui jouxte la manade Fano et abrite sur ses terres une brasserie artisanale ainsi qu’une miellerie – comme un écosystème vertueux. “C’est un être vivant, où toutes les activités se croisent et génèrent des ressources les unes pour les autres” résume-t-il, en évoquant la “richesse de sa biodiversité”, résultat, selon lui, de l’absence de traitement de synthèse dans les vignes et de l’application des principes de la biodynamie (préparations pulvérisées sur le végétal ou utilisées pour la fertilisation des sols notamment). C’est en 2005, que le déclic s’opère chez lui et qu’il découvre ce mode de culture. “Je participais à l’époque au salon ProWein de Düsseldorf comme exposant, pour le domaine et je n’avais pas un client qui s’arrêtait sur mon stand... Je suis allé visiter le salon ‘Off’ où j’ai assisté à une conférence de sur le vin et la biodynamie à laquelle participait Raimond de Villeneuve, le propriétaire du Château de Roquefort, que je connaissais et dont j’appréciais les vins, superbes.”
La bascule dans le parcours du jeune vigneron s’opère toutefois en 2008-2009, années au cours desquelles il est successivement certifié en bio puis par Demeter et impose “sa” stratégie pour la conduite du domaine. “Notre vin était jusqu’alors peu valorisé : il était à titre d’exemple essentiellement commercialisé en BIB, chez des cavistes. J’ai opéré à cette époque une refonte complète de la gamme, sur le fond et sur la forme” raconte Guillaume Lefèvre. Sur la forme, les bouteilles bordelaises et la mention ‘Château Sulauze’ sont supprimés et remplacés par des bourguignonnes (plus cohérentes avec la localisation provençale) étiquetées ‘Domaine de Sulauze’. Sur le fond, des cuvées plus qualitatives et aux noms poétiques – accessoirement – font leur apparition : ‘Pomponnette’, ‘Galinette’ ou encore ‘Les amis’. Il rachète également les stocks de vins du domaine, après le décès de son grand-père, avec l’objectif d’avoir les coudées franches vis-à-vis de sa famille.
Un recentrage en cours vers la France
Le succès commercial arrivera dans la foulée, en 2009 : “J’ai intégré Renaissance, un groupement de vignerons en biodynamie, et participé avec eux à un salon à Angers. J’ai eu la chance que mon vin plaise à des importateurs” résume modestement Guillaume Lefèvre. L’export représente aujourd’hui 60 % des ventes. Les blancs, rouges et rosés du domaine sont désormais vendus en Europe (Grande-Bretagne, Espagne, Italie, Suisse, Belgique, Pays-Bas, Allemagne…) comme en Amérique du Nord (USA) et en Asie (Corée).
La pandémie de Covid a toutefois amené le vigneron à revoir sa stratégie commerciale : “L’objectif, à l’heure actuelle, est de rééquilibrer la part des volumes expédiés à l’international, en faveur du territoire national, à travers notre clientèle de cavistes et de restaurants. D’autant que cela répond à une demande” conclut Guillaume Lefèvre.
Julien Dukmedjian
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