Gard
Installé depuis 2016, à Vauvert, Mathieu Lacan allie élevage bovin viande de race Angus et riziculture, en agriculture biologique. Récit d'une reconversion réussie en terres gardoises.
Mathieu Lacan
© Crédit photo : FG
Si Mathieu Lacan n'a aucun lien de parenté avec le fameux psychanalyste dont il porte le patronyme, il connaît la meilleure thérapie qui soit pour être en paix. "Je ne connais rien de plus apaisant que de regarder une vache brouter. C'est la meilleure thérapie qui soit, sans que cela ne coûte des centaines d'euros pour une psychanalyse", dit-il avec le plus grand des sérieux, avant de partir dans un grand éclat de rire. Mais à l'écouter raconter sa passion pour les vaches, on comprend vite que la boutade lancée détient une part de vérité, du moins pour son cas.
Sa passion "viscérale" pour cet animal remonte à sa plus tendre enfance. Originaire de la Haute-Loire, la famille de Mathieu vient s'installer dans le Gard, mais revient aux sources chaque été pour les vacances. "Je passais tout mon temps au cul des vaches de notre voisin fermier. J'adorais ça, sans savoir l'expliquer, si ce n'est que j'étais fasciné par la force tranquille qu'elles dégageaient", se souvient-il. Et d'imaginer alors que lui aussi, un jour, comme ce fermier, pourrait passer ses journées auprès de telles bêtes. Sans lien ni histoire avec le monde agricole, ceci expliquant peut-être cela, les conseillers d'orientation de son collège le dissuadent de suivre des études en agriculture malgré son envie, et l'incitent à choisir une formation en vente, plus prometteuse en termes d'avenir. Mathieu se soumet à leur jugement et décroche, à la suite d'un stage, un CDI dans une entreprise spécialisée en électro-ménager, dans laquelle il restera sept ans avant de succomber à son irrésistible envie. "J'allais au travail sans envie ni passion. Je me posais beaucoup de questions et je me disais que je ne voulais pas vivre avec des regrets. Alors, en 2013, j'ai sauté le pas et j'ai signé une rupture conventionnelle pour pouvoir engager une reconversion professionnelle", raconte-t-il.
En l'absence de connaissances en agriculture, il lui faudra une année complète pour accomplir son BPREA (Brevet professionnel responsable d'entreprise agricole) et décrocher sa capacité professionnelle agricole. Mais le diplôme reste une formalité comparativement à son parcours d'installation, qu'il qualifie de "parcours du combattant. Se lancer dans la production de viande bovine, de surcroît dans un territoire qui n'est pas un bassin d'élevage, et en sortant de nulle part, cela a été la croix et la bannière. C'était très dur d'être crédible aux yeux de tous".
Autre obstacle : l'accès au foncier. "J'ai vraiment beaucoup galéré pour trouver des propriétaires qui me louent des terres. J'ai donc eu beaucoup de baux précaires avant de décrocher des conventions de pâturage de plus long terme auprès de particuliers", rapporte-t-il. Mais quand la passion est sincère, le sort peut s'en mêler et donner un coup de pouce inespéré. Le "sort" sera incarné, pour lui, par Bernard Poujol, riziculteur de son état et qui, s'inspirant d'une méthode mise au point au Japon, fait assurer le désherbage de ses rizières par son élevage de canards.
Le riziculteur sera le premier à l'encourager à se lancer dans son projet d'élevage de bovins viande, en lui vendant de l'herbe et en lui prêtant du matériel, tout en lui démontrant la cohérence d'un système agronomique en culture bio associant riziculture et élevage. Et dans la famille Poujol, c'est le fils de Bernard, Adrien, détenteur d'un petit cheptel de vaches angus, qui lui fera découvrir cette race. "L'angus est une race rustique parfaite pour un élevage en plein air intégral. De plus, sur le plan génétique, elle est sans corne, ce qui présente moins de danger pour sa manipulation. C'est aussi une race docile. Et, pour finir, la qualité de sa viande est très reconnue. Et s'il fallait encore ajouter aux qualités qu'elle présente, l'angus n'a pas de grosses conformations. Aussi ses besoins en fourrage sont moindres", déroule l'éleveur.
De fait, quand Adrien souhaite vendre son troupeau, Mathieu Lacan l'achète immédiatement, et le complète en acquérant cinq génisses de plus, ce qui lui permet de démarrer avec une quinzaine de mères. Pour faire en sorte que ces bêtes soient sereines et le plus docile possible, il n'utilise pas de chien dans leur conduite et assure une présence à pied quotidienne à leurs côtés. Pour les jeunes bovins au sevrage, il applique la méthode Souvignet, basée sur la douceur, le non-stress et le respect mutuel de l'homme et de l'animal.
En parallèle, il s'est lancé, depuis 2018, dans la culture de deux variétés locales de riz sur 10 hectares irrigables à Saint-Gilles, conduits en AB. Il pratique des rotations longues de 5 à 6 ans, au cours desquelles il plante alors une céréale à paille ou une légumineuse pour laisser reposer les terres et avoir de quoi nourrir ses bêtes. "J'essaie de mettre en place un cercle vertueux me permettant de produire ce dont les bêtes ont besoin, et ces dernières me permettent de produire en enrichissant mes sols", explique-t-il. Entre pâturage tournant, pratique de l'agro-bio, plantation de haies, accueil de ruches d'un apiculteur sur ses terres et futur projet en agroforesterie, l'éleveur cherche la cohérence parfaite entre agriculture et environnement. Telle est sa conception du métier. Et cette fois-ci, aucune rupture conventionnelle projetée. "C'est un bail à long terme que j'ai signé avec mes bêtes", conclut-il dans un large sourire.
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