"Rien qu'en traitant les marcs et les lies de nos adhérents, l'activité élimi- ne l'équivalent d'une station d'épuration d'une ville de la taille de Marseille." C'est avec ces mots que Vanessa Delaëre, secrétaire générale, directrice RH et chargée de communication, présente avec fierté l'Union des distilleries de la Méditerranée. 

La coopérative collecte les sous-produits de la viticulture de 22 départements. "Cela représente un peu plus de 20 % de la production viticole française. Nous sommes les leaders du secteur de la distillerie française coopérative viticole." Les déchets sont recyclés au sein de six sites : Vauvert, Lespignan, Saint-André-de-Sangonis, Vallon-Pont-d'Arc, Olonzac, ainsi que la distillerie du Beaujolais. Car l'UDM est détentrice depuis le 1er septembre de 80 % des parts de la distillerie privée du Beaujolais. "À travers notre filiale, nous avons augmenté notre implantation sur les secteurs Bourgogne et Champagne", se réjouit Vanessa Delaëre. 

Le siège social est situé à Vauvert, un site qui existe depuis 1973. 

Des stocks record de marc

Le groupe connaît une activité exceptionnelle cette année à plusieurs égards. Tout d'abord, l'UDM bat ses records de collecte de marc, avec notamment 38 000 tonnes récoltées sur le site d'Olonzac, 49 000 t sur le site de Vauvert, et 80 000 t sur le site du Beaujolais. "Les viticulteurs n'ont pas forcément eu une très belle vendange. Mais pour nous, c'est une très grosse année, car cela nous a ramené beaucoup de marc", note la secrétaire générale. Au total, le groupe estime être proche des 200 000 tonnes, contre 170 000 t l'année dernière, une année qu'il caractérisait pourtant déjà de "très belle."

Distillation de crise rime avec adaptations

En parallèle, l'UDM fait face à la distillation de crise répartie en trois phases. "Une logistique compliquée", reconnaît Vanessa Delaëre. "La décision a été prise très tardivement. Nous avions le site de Vallon-Pont-d'Arc qui était inopérant, donc ce sont les sites d'Olonzac et de Vauvert qui ont récupéré toute la première tranche." Soit 280 000 hectolitres de vin provenant de 170 caves coopératives, ainsi que de quelques caves particulières de grande taille. 

La deuxième phase, débutée la troisième semaine d'octobre a été encore plus compliquée à organiser, malgré l'utilisation de trois sites. "C'est la période à laquelle nous commençons à traiter le marc. Nous avons beaucoup stressé, car nous ne pouvons pas démultiplier nos outils. Les camions doivent à la fois aller chercher le marc, mais aussi le vin. Nous avons dû sacrifier des périodes de maintenance, mais nous avons aussi sacrifié des périodes de vacances. Nos équipes devaient être en récupération et en formation la semaine du 1er novembre. Nous avons dû les faire travailler, y compris le 1^er novembre pour être au rendez-vous pour la viticulture", explique-t-elle. 

Le groupe a également pris la décision de déplacer une colonne à distiller inutilisée sur le site de Lespignan, pour l'installer sur le site d'Olonzac, afin d'accroître sa capacité de distillation. 

Un groupe en pleine évolution

Outre ces adaptations faites dans l'urgence, l'UDM est en pleine transition, afin de s'adapter aux enjeux d'aujourd'hui et de demain. 

Pour ce faire, le groupe a pris la décision de spécialiser ses sites. "Nous sommes dans l'amorce de notre transition industrielle. Les sites de Vauvert et d'Olonzac auront pour objectif de traiter du volume, d'être efficaces. Nous allons progressivement spécialiser les autres sites avec par exemple une activité centrée sur les colorants, polyphénols et les tanins à la distillerie de Vallon-Pont-d'Arc", explique la secrétaire générale. De plus, lorsqu'un site a beaucoup plus de production qu'un autre, il peut effectuer un transfert. C'est notamment ce qu'il s'est passé lors de la collecte record de marc à la distillerie du Beaujolais, qui en a rapatrié vers le site de Vallon-Pont-d'Arc, qui n'en comptait que 15 000 tonnes.

De nombreux investissements sont également faits. "Nous arrivons à dégager de bons résultats depuis cinq ans. Depuis trois ans, sur 17 millions d'euros, nous en avons réinvesti 13 dans les usines, avec pour objectif d'être encore là demain."

"Nous avons une vision globale avec pour but, à terme, d'être autonomes"

Le groupe en est conscient : les distilleries sont très gourmandes en termes d'énergies. "Nous en avons besoin pour l'ensemble de nos productions. L'eau chaude est nécessaire pour laver les marcs à l'entrée, la vapeur d'eau pour distiller et rectifier, etc." Alors, parmi les projets en cours, il y a la volonté de devenir autonomes d'un point de vue énergétique.

"Lorsqu'il y a eu le choc énergétique il y a un an et demi, nous étions couverts sur l'aspect financier, car nous avions des contrats de gaz et d'électricité à prix bloqués. Mais les contrats arrivent à échéance, et nous devons nous organiser." Sur les sites de Vauvert et de Vallon-Pont-d'Arc, 50 % de leurs besoins sont déjà couverts par la biomasse. Mais le groupe veut aller plus loin, afin de s'assurer une pérennité. Sur le site de Vauvert, un projet de valorisation énergétique du foncier avec l'installation de panneaux photovoltaïques est donc par exemple en cours. "Cela devrait nous permettre de récupérer 1 000 mégawatts par an, soit 18 à 20 % de notre consommation", indique Franck D'Herbomez, directeur du site.  

"Nous avons une vision globale avec pour but, à terme, d'être autonomes. L'objectif est d'économiser les ressources. À l'intérieur du site, nous avons donc aussi des projets autour de l'eau, de séparation d'eau sale et d'eau propre, afin de pouvoir réutiliser l'eau propre. Nous récupérons déjà les eaux de toiture sur deux sites, donc nous souhaitons le faire ici aussi", explique-t-il. "Les distilleries ont toujours travaillé sur le pôle énergétique. Nous avons des équipements qui nous permettent de récupérer de la chaleur, grâce à un ensemble de systèmes sur lesquels nous travaillons déjà depuis 30 ans. Nous récupérons nos condensats. Ils nous servent à laver nos marcs, à nettoyer nos appareils. Cela fait partie de la culture énergétique des distilleries. Aujourd'hui, nous avons encore une marge de 30 % que nous pourrions récupérer sur le site de Vauvert. C'est en projet. L'idéal serait de mettre cette eau condensée dans les chaudières, et là, nous serions en circuit fermé", prévoit-il. Des projets partiellement déjà mis en œuvre sur le site d'Olonzac d'après Vanessa Delaëre. "Nous utilisons les eaux de condensats, afin d'alimenter nos tours aéro-réfrigérantes. Nous estimons cette économie d'eau à 15 000 à 20 000 m³ par an."

L'Union des distilleries de la Méditerranée investit donc afin de moderniser ses usines pour l'avenir, avec comme objectif de préserver "les viticulteurs, ceux qui font notre matière première, afin qu'ils soient toujours là demain."

6 sites : Vauvert, Olonzac, Vallon-Pont-d'Arc, Lespignan, Saint-André-de-Sangonis, la distillerie du Beaujolais

170 salariés

50 M€ de chiffre d'affaires

170 caves coopératives

6 000 caves particulières