"In vino veritas", écrivait en son temps Pline l'Ancien. Si ce n'est pas forcément la vérité qu'Olivier Faucon a découvert dans le vin, il y a trouvé le sens qu'il cherchait à donner à sa vie à l'orée de la quarantaine. Amateur de vin, Olivier Faucon l'a toujours été, mais pas au point d'imaginer que, comme Alice, il traverserait un jour le miroir pour plonger dans cet univers. Après des études de commerce à Lille, il va de par le monde pour assurer la communication et le marketing de différentes multinationales. De l'Europe à l'Asie, le petit gars du Nord peaufine projets et stratégies avec son équipe, sans se lasser, et toujours curieux des pays dans lesquels il pose ses valises. Mais la quarantaine pointant le bout de son nez, l'envie de créer quelque chose en propre s'invite. Point de crise avec le début de cette nouvelle décade, juste "une quête de sens comme, en fait, tout le monde", explique-t-il.

Mais quelle voie emprunter ? C'est une bande-dessinée, "Ode aux ignorants", d'Étienne Davodeau, qui va être le déclencheur. "Cette BD raconte la nouvelle vie de Richard Leroy, un ancien banquier qui s'est reconverti dans la viticulture. Son histoire m'a fait réaliser que ce n'était pas impossible de se lancer si on le souhaitait. Aussi je me suis dit que plutôt que de passer mon temps à aller goûter des vins, pourquoi ne pas en faire, d'autant que cela me permettait d'associer ma passion pour le vin à ce que je savais déjà faire en matière de marketing et de communication", raconte-t-il. Dès lors, l'idée n'a de cesse de trotter dans sa tête comme les aiguilles d'une montre jusqu'à ce que sa compagne finisse par lui dire d'essayer. Raison oblige, Olivier Faucon décide, en 2013-2014, de passer un BTS en viticulture-œnologie, à Beaune, pour confronter son envie à la réalité du métier. Le test étant concluant, ne reste plus qu'à trouver le lieu idéal pour débuter sa "seconde carrière", comme il le dit.

Coup de foudre pour les Terrasses du Larzac

Amoureux du Sud et de ses vins, dont ceux des Terrasses du Larzac qu'ils découvrent au cours d'une dégustation, puis considérant la région plus hospitalière pour les néo-vignerons que le Bordelais ou la Bourgogne, il passe 6 mois au Mas Cal Demoura, chez Isabelle et Vincent Goumard, pour se familiariser avec la région, ses cépages, le travail à la vigne et à la cave. "Je suis tombé amoureux de tout, à tel point que je me suis dit que c'était dans cette région que je voulais m'installer", se souvient-il. Pour ne se fermer cependant aucune porte dans sa recherche d'un domaine à acheter, il sillonne la région, de Carcassonne, à Pézenas, et jusqu'à la vallée du Rhône sud, durant un an et demi. Mais, après chaque visite, c'est toujours vers les Terrasses du Larzac que son regard se porte. Apprenant que des viticulteurs souhaitent vendre leurs parcelles, situées entre Montpeyroux, Saint-Jean-de-Fos et Arboras, l'occasion, considère-t-il alors, est trop belle pour la laisser filer, même s'il lui faut créer ex nihilo son domaine.

Hébergé durant deux ans au Domaine de Salente, à Gignac, en attendant que sa cave soit fin prête, il concentre toute son attention à la conversion des vignes en agriculture biologique. "C'était une évidence pour moi de le faire d'entrée de jeu, car notre habitation étant prévue au milieu des vignes, je ne voulais pas exposer mes proches et mes clients. Puis, j'avais la volonté de travailler de la manière la plus propre et la plus naturelle possible", commente-t-il. Il opte pour un travail du sol avec interceps, une taille plus stricte pour avoir des raisins de meilleure qualité, et reprend l'encépagement. Si les 5 cépages dont il dispose alors, à savoir la syrah, le grenache noir et blanc, le carignan et le cinsault "étaient une très bonne base de départ, j'avais envie d'explorer d'autres pistes. Pour cela, j'ai fait du surgreffage de mourvèdre, de carignan blanc, de chenin et de vermentino, des cépages que j'aime beaucoup", dit-il.

Si le néo-vigneron enchaîne, au départ, les erreurs de débutant, il n'hésite jamais cependant à s'appuyer sur ses pairs et à se documenter autant que possible. "Ce qui est difficile, au début, c'est le manque de savoir paysan. De fait, prendre des décisions sur lesquelles on n'a pas toutes les clés, quand on est néo-vigneron, et même néo-paysan comme je l'étais, suscite quelques appréhensions, mais il faut avancer. Heureusement, j'ai un côté un peu"risquophile"et aime tenter des expériences", confie-t-il. Et d'en faire de même pour ses vins.

Mise en valeur de l'identité des cépages 

Même si le vigneron cherche à faire des vins les plus naturels possibles, comprenez avec le moins, voire sans sulfites ajoutés, et avec une gestion des levures au cordeau, il avance "sans dogme", mais avec un objectif bien précis : produire des vins sur le plaisir, l'élégance et l'équilibre, ainsi que des cuvées haut-de-gamme mettant en valeur l'expression identitaire des cépages locaux et des terroirs. Les vins sont élevés en cuves inox, béton, foudre, barriques, amphores en grès ou œufs béton, de 8 à 30 mois selon les cuvées.

De sa premières cuvée signature, 'Ode aux ignorants', à la dernière, 'Lueurs d'Espar', il remporte immédiatement les suffrages des critiques de vins. Le néo-vigneron, qui continue à se qualifier de "néophyte", n'a pas fini de faire parler de lui. Toujours poussé par l'envie d'explorer les mille et une nuances des vins qu'il rêve de faire, le"néophyte" continue à étonner. Impossible dès lors d'ignorer ses cuvées.