L'arrivée des premières floraisons annonce chaque année le début d'une activité intense pour tous les apiculteurs de la région. Dans quelques mois, elle trouvera un pic avec la floraison des lavandes. Depuis quelques jours déjà, Lawrence Davie positionne ses ruches sur le romarin, dans les secteurs de Lançon, La Fare-les-Oliviers et du côté des Alpilles. Viendra ensuite le temps de transhumer les ruches un peu plus loin - dans la Drôme, l'Ardèche et l'Hérault - pour diversifier les miels produits en fonction du calendrier de floraison, de l'acacia du châtaignier, de la bruyère blanche, etc.

"C'est du travail et des déplacements, mais ils sont indispensables pour proposer une large gamme de productions", indique l'apiculteur de Châteaurenard. Comme tous les ans, la météo dictera ce que les floraisons permettront de produire d'autant que, "ces dernières années, les miellées d'acacia n'ont pas été faciles, et que la saison de lavande a été compromise l'année dernière, en raison du manque d'eau", ajoute l'apiculteur.

Mais lui qui s'est lancé dans le métier il y a une dizaine d'années n'est pas prêt à renoncer. Au contraire ! Laurence, sa compagne, l'a rejoint sur l'exploitation il y a deux ans. Ensemble, ils ont créé le Gaec 'Les ruchers du renard' pour étendre leur activité et notamment développer la vente au détail.

Native de Barbentane, Laurence a donc débuté son activité agricole en 2021. Elle travaillait avant dans le milieu hospitalier qu'elle a volontiers quitté, "par choix et en recherche d'un meilleur équilibre de vie pour la famille".

Lawrence vendait jusque-là toute sa production, en gros, à la coopérative 'Provence miel', à La Roque- d'Anthéron. "La vente au détail prend du temps que je n'avais pas suffisamment. Reprendre en main la commercialisation de la production était un objectif, même si je reste adhérent à la coopérative. Mais, pour pouvoir mieux valoriser la production, il fallait être deux", explique-t-il.

Produire, élever et polliniser...

Ayant débuté avec 12 colonies, Lawrence en a aujourd'hui 700. Il a aussi progressivement développé d'autres activités que la production de miels. Il propose du pollen ainsi que des prestations, comme la pollinisation et la vente d'essaims. Cette activité consiste à élever des essaims l'hiver et à les vendre aux apiculteurs, pour renouveler les cheptels quand le printemps redémarre. Lawrence explique que "l'élevage prend énormément de temps pour un apiculteur et, en se fournissant chez un éleveur, il peut disposer d'une ruche directement prête à produire. 250 essaims sont vendus généralement par an aux professionnels. Les prochains vont ainsi partir au mois d'avril. Ce sont de ruches prêtes pour la saison".

La vente de miel est l'activité qui reste la plus intéressante ; mais il faut avoir les reins solides financièrement. L'élevage et la pollinisation sont justement deux compléments permettant de générer de la trésorerie plus rapidement. La pollinisation représente, pour le couple d'apiculteurs, un revenu de 25 000 euros environ. Il faut dire que, sur le melon par exemple, la pollinisation est longue, avec les exploitations qui font plusieurs rotations sur la saison. "Vu les contraintes logistiques, on s'efforce d'avoir des contrats avec des agriculteurs qui ont besoin d'un nombre important de ruches. On ne se déplace pas pour quelques unités", indique Lawrence.

Bientôt un nouveau bâtiment

Quand Laurence démarre son activité en 2021, le Covid était aussi encore très contraignant sur beaucoup d'aspects. Puis, l'arrivée d'un deuxième enfant a aussi quelque peu freiné la mise en route du projet. Mais les choses avancent aujourd'hui : la jeune femme a lancé les nouvelles étiquettes et développé un site, qui reste à peaufiner, pour permettre le e-commerce.

L'atelier de vente au détail est la nouvelle activité dont elle aura aussi la charge, dans le bâtiment agricole qui doit être prochainement construit sur leur terrain. "On pourra enfin travailler correctement, avec un véritable outil de travail. Tout le matériel pourra être abrité, et il y aura aussi toute l'extraction du miel", rapporte Laurence.

Le couple est aussi heureux d'avoir obtenu des aides de la Région Sud pour l'achat d'une chaîne d'extraction. À l'heure actuelle, cette activité coûteuse (de l'ordre de 0,80 €/kg) est sous-traitée, et la machine devrait être amortie très rapidement. Les nouvelles installations attendues sur le Gaec vont aussi permettre au couple de se diversifier, à terme, dans la transformation avec les produits de la ruche autour de la confiserie, de pains d'épice, de bougies, de la cosmétique, etc.

Parce que les fleurs n'attendent pas

L'entreprise familiale a à cœur de travailler dans le respect des abeilles et de valoriser les produits des ruches. Lawrence et Laurence sont engagés dans une démarche collective de qualité et de communication, autour de l'apiculture en Provence et de l'IGP 'Miel de Provence'. "Le bio ? Peut-être un jour, mais le marché est à l'heure actuelle plutôt saturé. Mais on ne se l'interdit pas", précise Lawrence. Le couple souhaite pouvoir lancer pleinement l'activité de vente au détail pour l'envisager.

"Parce que les fleurs n'attendent pas, la gestion du temps est l'un des aspects le plus difficiles du métier", estime Lawrence. Cette année, c'est tardif ; l'année dernière, c'était précoce. "C'est la nature qui donne le tempo. Trouver des emplacements pour les ruches devient aussi de plus en plus compliqué. Il y a l'urbanisation, qui gagne les milieux naturels, mais aussi le climat de plus en plus sec, les incendies l'année dernière du côté de la Montagnette..." Le métier d'apiculteur demande avant tout de la passion. "Observer, se remettre en question et, à chaque saison, être plus riche de ses expériences, même si rien n'est facile. Mais entre les bonnes, et surtout les moins bonnes, années, on ne sait jamais la quantité de miel que l'on pourra produire", reconnaît aussi Lawrence. 

Création du Gaec en 2021

700 colonies d'abeilles

10 à 12 tonnes de miel par an

250 essaims/an vendus en moyenne

à venir : un bâtiment de 500 m² qui abritera toute la chaîne d'extraction et un point de vente