Rencontre terrain
Ancrés dans leur territoire, les parlementaires du département ont été sollicités à Saint-Rémy par la profession pour faire bouger les lignes à Paris.
Complexité de la Pac, main-d'œuvre, surenchère administrative, distorsion de concurrence... Les agriculteurs ont témoigné de leurs difficultés.
© Crédit photo : ED
Se mobiliser sur le terrain, occuper l'espace public, médiatiser leurs difficultés et faire remonter au gouvernement les messages que ce dernier a du mal à entendre, les agriculteurs s'y emploient à nouveau depuis plusieurs semaines. Et, ces derniers jours, la mobilisation agricole s'est poursuivie dans le département. Dans les secteurs de Berre, Salon ou Châteaurenard notamment. Dans le Pays d'Aix, vendredi 22 novembre, plusieurs agriculteurs indépendants et leurs tracteurs avaient choisi de bloquer l'accès à cinq supermarchés de la ville de Pertuis. À quelques dizaines de kilomètres, à Meyreuil, au rond-point du Canet, pas de blocage, mais des tractages organisés par les syndicats de la FNSEA 13 et des JA des Bouches-du-Rhône, dans le but de sensibiliser la population sur les enjeux de leur mobilisation.
Un peu plus tard dans la matinée, c'est à l'autre bout du département, du côté de Saint-Rémy-de-Provence, qu'agriculteurs de la FNSEA et des JA 13 rencontraient cette fois élus et représentants des citoyens. Une dizaine de parlementaires a répondu à leur invitation. Plusieurs visites d'exploitations étaient prévues, afin de leur faire toucher du doigt les réalités agricoles. Une initiative logique, puisque ce sont ces députés et sénateurs qui, depuis leur circonscription, attirent l'attention du gouvernement sur leurs actions, votent les lois et en proposent. "Ce sont 30 ans de sédimentation de législation qui ont mené l'agriculture dans la situation actuelle. Notre volonté est de vous parler des problématiques départementales, mais aussi de ce qu'il se passe dans le pays puisque votre représentativité est nationale. Dans le projet de loi de finances, le monde agricole porte beaucoup d'efforts. 400 millions d'euros destinés à l'agriculture sont, par exemple, en suspens. On compte sur vous, car votre rôle est déterminant dans le débat public et la politique du pays", expliquait Romain Blanchard, président de la FNSEA 13.
Si le poids de l'agriculture n'est évidemment pas le même dans les circonscriptions des Bouches-du-Rhône, tous les candidats étaient pourtant les bienvenus. Et c'est sur l'exploitation maraîchère de Laurent Deville que la rencontre amicale a débuté. "J'ai découvert que la famille Deville, ma famille, nourrissait la France depuis 1540. C'est une fierté. La lettre que les agriculteurs ont reçue en 2020 du ministre de l'Agriculture, Didier Guillaume, m'avait galvanisé. Toute l'agriculture avait répondu présente pour continuer de nourrir la France, sans savoir où nous allions. Mais quatre ans après, j'ai l'impression que nous sommes pris pour ces cons. Respectez vos agriculteurs et ceux qui nourrissent la France", lançait à son tour le producteur de salades.
Il faut dire que sa filière se heurte frontalement aux augmentations de taxes. "À chaque augmentation de taxe sur les salaires ou la logistique, c'est sur le produit final qu'elle est répercutée. Aujourd'hui, une salade nous revient à 50 centimes ; en 2021, elle nous revenait à 46 centimes ; et en 2013, à 43 centimes. Mais il faut savoir que nous avons été impactés par une augmentation de la masse salariale entre 2021 et aujourd'hui de 15 %", rapportait Laurent Deville.
Chez Jean-Pierre Perez, spécialiste de la tomate sous serre, c'est sur la question de la perte de souveraineté alimentaire sur la tomate (- 12 % en une année sur la tomate) ou encore la concurrence marocaine que les parlementaires ont été sensibilisés. "Sur les étals, une tomate sur deux est étrangère. Il est important que vous, élus, compreniez notre travail et ce qui nous porte préjudice, afin de proposer les mesures qui nous permettent d'être rémunérés justement", lançait le producteur saint-rémois.
Benoît Colombet élève des taureaux et chevaux de Camargue de père en fils. Il a pu témoigner de ses difficultés. "Tout devient compliqué aujourd'hui. On respecte la Pac, on en a besoin pour nos élevages extensifs. Mais les contraintes et les contrôles augmentent, tandis que les aides et les revenus baissent", confiait le jeune éleveur.
Installé depuis 2021 en tant que jeune vigneron sur Saint-Rémy, René Milan (Domaine Fontchêne) confirme cette asphyxie administrative et réglementaire du quotidien : "Quand on monte une exploitation, les contraintes administratives sont très lourdes et, de l'autre côté, obtenir un permis de construire sur son outil de travail devient impossible. Pour produire, j'ai commencé dans le garage de mes parents. Rien n'avance, je ne peux pas stocker mon matériel correctement ni travailler dans de bonnes conditions".
En arboriculture fruitière, les obstacles sont tout aussi lourds. "Cela fait des années que l'on se bat pour essayer de conserver les exonérations de charges TO-DE, des aides primordiales pour l'emploi de notre main-d'œuvre. Elles ne nous permettent pas de vivre mais de tenir. Si le gouvernement décide de les lever, c'est la fermeture assurée à la fin de l'année de très nombreuses exploitations", explique Denis Poggi, arboriculteur à Noves. Et d'ajouter, concernant les contrats de travail en provenance du Maroc, que "malgré le passage de l'arboriculture en métiers en tension, les demandes de visas, pourtant acceptées, sont bloquées à l'ambassade de France. On nous trouve toujours quelque chose, c'est infernal ! Si on n'a plus de main-d'œuvre, on ne pourra plus travailler".
Au cours de la rencontre, les parlementaires présents ont eu droit à une présentation rapide des atouts et des fragilités de l'agriculture du département. Complexité de la Pac, difficultés de trouver de la main-d'œuvre, surenchère administrative française, distorsion de concurrence liée à libre circulation des produits... Les prises de paroles se sont succédé pour expliquer aux élus combien les contraintes et les menaces étaient nombreuses. La plupart des fléaux qui handicapent les filières à l'échelon du département ont été abordés.
Quelquefois médusés, mais curieux et toujours très à l'écoute, ils ont pris la mesure des solutions d'urgence et des modifications à plus long terme qui s'imposaient pour pérenniser l'agriculture du territoire. Les invités du jour sont maintenant attendus sur leur volonté à redonner un avenir au secteur agricole.
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