Occitanie
Le prochain Dionysud ouvrira ses portes au parc des expositions de Béziers, les 5, 6 et 7 novembre, dans un contexte économique tendu. Début octobre, le salon a dévoilé sa sélection d'innovations.
Omnia Technologies, pour le centre de pressurage continu Ampelos, et Clemens avec le système d'ouverture automatique aux piquets pour prétailleuse.
© Crédit photo : Dionysud
Plutôt discret en termes de communication, malgré la puissance de frappe de son organisateur NGPA (Vitisphère, La Vigne...), Dionysud ouvrira ses portes comme à l'accoutumée à Béziers les 5, 6 et 7 novembre. Alors que nombre d'agriculteurs préparent leurs dossiers d'arrachage, et que les concessionnaires font grise mine avec des ventes en net recul, le salon se prépare et a divulgué ses 4 focus innovation.
Le centre de pressurage pneumatique continu Ampelos est un système de pressurage intégré, qui permet de travailler en cycle continu. Le système se compose de trois pressoirs automatiques reliés par des capteurs et une intelligence artificielle intégrée. Le mode continu est obtenu en créant une synergie entre plusieurs petits pressoirs individuels utilisés en mode discontinu.
L'application Sun'Agri App permet à l'agriculteur d'accéder aux données de l'ensemble des capteurs installés à la parcelle. Station météo, capteur d'ensoleillement... sont consultables en temps réel sur smartphone ou ordinateur. Des courbes de comparaison avec une parcelle de référence à proximité sont aussi consultables.
Témoignages
La déconsommation est là et semble même s'accélérer ces derniers mois, soutenue par une inflation qui met à mal le porte-monnaie des consommateurs. Pourtant, des voies d'avenir peuvent être empruntées : élargir la gamme, segmenter l'offre, conquérir de nouveaux marchés, augmenter sa visibilité.
TÉMOIGNAGES
Chez Alma Cersius, à Cers, investissement, quête régulière de segmentation et nouveaux marchés export sont les objectifs de cette cave coopérative qui a misé sur la bouteille, il y a déjà 20 ans.
Chez Alma Cersius, pas question de s'affirmer comme détenteur de la science infuse. Marc Robert, son président, échange souvent avec les coopératives alentours, et invite volontiers à visiter la structure.
© Crédit photo : ML
Chez Alma Cersius, le mot d'ordre a toujours été le même : attendre. "L'année prochaine, cela fera 20 ans qu'on s'est mis à la bouteille. Nous avons très vite mis en place des cahiers des charges stricts et, au départ, on nous riait au nez de nous voir vendanger si tard", retrace Marc Robert, président de la cave coopérative Alma Cersius. Toujours est-il que, pour avoir la maturité la plus expressive dans des vins de qualité, attendre reste ce que les techniciens estiment être le plus efficace. Résultat des courses : 8,3 millions de bouteilles en 2023 - dont 80 % vendues dans les caveaux - et probablement jusqu'à 10 millions en 2024.
Après de multiples fusions, Alma Cersius continue son expansion et complète son offre avec des terroirs diversifiés. "Nous avons des vins qui vont de la mer à Hérépian, à près de 450 mètres d'altitude. Ce sont des terroirs d'avenir", affirme le président. Avec 250 vignerons sur quelque 1 500 hectares, le gâteau s'est agrandi pour garantir des revenus aux coopérateurs.
"Parce que le pouvoir d'achat s'est compressé en France comme à l'export, nous avons continué à nous diversifier et sommes dorénavant présents dans 33 pays. Dernièrement, nous avons vendu environ 6 000 bouteilles au Kenya", développe Marc Robert. Selon lui, les débouchés à l'international sont entre autres permis par la flexibilité offerte des Pays d'Oc et les IGP locales : "Nous avons des vins qui correspondent à la demande, avec un bon rapport qualité-prix-plaisir, tout en ayant la possibilité de faire du 90 hectolitres à l'hectare avec Pays d'Oc. Nous avons également beaucoup axé notre communication sur les cépages, ce qui facilite l'accès à l'export." Avec cette logique, la production de rouges n'est même pas mise en difficulté.
Chez Alma Cersius, pas question de s'affirmer comme détenteur de la science infuse. Marc Robert échange souvent avec les coopératives alentours, et invite volontiers à visiter la structure. D'autant qu'elle ne cesse d'investir dans ses outils pour conserver de la performance. La cave est notamment en train de concrétiser son projet de nouveau bâtiment à Cers, à proximité de la zone d'Intermarché, dont les travaux débuteront en février prochain.
Sur un peu plus de 8 000 m², le bâtiment accueillera une chaîne d'embouteillage longuement attendue, car la coopérative louait jusqu'ici des camions. Un contrat de dix ans engagera le prestataire, qui fixera les prix selon la production annoncée et mettra à disposition le personnel. De quoi rentrer rapidement dans les frais selon le président. 40 000 hl de cuverie inox pour rapatrier les vins des différentes caves et permettre l'embouteillage sur place y trouveront également leur place, ainsi qu'un lieu de stockage pour environ 3 000 pa- lettes et les nouveaux bureaux du personnel.
"Vu l'emplacement proche de l'axe Béziers-Cap d'Agde, on s'est dit qu'on ne pouvait pas ne pas faire de caveau. Il y en aura donc un de 300 m² qui complétera les quatre autres existants, en sachant que, jusqu'ici, nous n'en avions pas sur la commune", ajoute Marc Robert. Porté par la SAS avec l'appui de FranceAgriMer, l'agglomération et la Région, entre autres, le projet confère à la cave un solide atout pour poursuivre son développement. De quoi permettre à ses coopérateurs d'envisager un peu plus sereinement la crise actuelle.
TÉMOIGNAGES
Si le segment des boissons sans alcool est porteur, certains vignerons - qui n'ont pas exclu cette voie de diversification - préfèrent pour le moment capitaliser sur les atouts de leurs dénominations, qui convergent avec les attentes des consommateurs.
Patrick Michel, du Mas de Valériole, à Arles (13), entend gagner le cœur des nouveaux consommateurs et des millennials en mettant l'accent sur la fraîcheur et le segment de vins fruités, légers.
© Crédit photo : Hervé Hôte
Le vignoble du Mas de Valériole s'étend sur 34 hectares de vignes, en plein cœur du parc régional de Camargue. Son propriétaire, Patrick Michel, perpétue aujourd'hui l'héritage familial en agriculture biologique. Il cultive ses vignes classées en IGP Bouches-du-Rhône et Méditerranée, en produisant des vins sur les trois couleurs. Il développe aussi l'identité camarguaise de sa production grâce à la mention territoriale 'Terre de Camargue'.
La famille Michel produit en moyenne 2 500 hectolitres de vins, dont 50 % de vins rosés, qu'elle commercialise en direct sur le domaine, mais aussi dans le réseau traditionnel et à l'export. Sans perdre son identité camarguaise, le vigneron est conscient de la "nécessité de s'adapter et d'innover pour répondre aux nouveaux défis lancés par les consommateurs". Car après un cycle de croissance lié au succès commercial du rosé, le contexte change.
En lien avec la déconsommation, Patrick - qui a fait le point sur les ventes du domaine à fin juillet - a constaté sur cette dernière campagne une baisse significative sur ses gammes de vins intermédiaires, des cuvées se situant autour de 9 euros. "Elles ne représentent pas l'essentiel de nos volumes, mais correspondent plutôt à des marchés de niche. Les consommateurs regardent plus que jamais le prix de la bouteille, et leurs achats se sont plutôt reportés sur les cuvées les moins chères", rapporte-t-il.
Même s'il prend le sujet de la désalcoolisation avec sérieux, il n'envisage pas pour le moment de réduire la teneur en alcool de ses vins et de s'engouffrer dans cette voie de diversification. "La piste n'est pas prioritaire. Développer un jour des produits différents pour enrichir la gamme à proposer à nos consommateurs n'est pas exclu. Mais, pour l'heure, ces vins désalcoolisés, ou partiellement désalcoolisés, sont loin d'être satisfaisants d'un point de vue qualitatif. Ils sont aussi plus chers à produire. Et, pour l'instant, nos acheteurs ne nous en ont pas fait la demande", explique Patrick Michel.
Aussi le vigneron entend plutôt capitaliser sur les atouts des vins qu'il produit et qui correspondent aux attentes d'une grande partie du public. "Sur le domaine, nous privilégions pour le moment de continuer de travailler sur les avantages des IGP, à savoir la créativité et la liberté d'assemblage pour répondre aux attentes des consommateurs", indique Patrick Michel.
Chez une partie des consommateurs, la tendance est en effet à la découverte de nouveaux horizons, mais elle est aussi portée sur des vins plus faciles à boire. "C'est ce qui nous pousse à vouloir mettre l'accent sur la fraîcheur et le segment de vins fruités, légers. Nous avons d'ailleurs planté des variétés de cépages assez aromatiques, comme le muscat petits grains ou le cépage résistant sauvignac, pour arriver à baisser le degré sans perdre en qualité. Parce que, pour aller chercher le fruit, il faut aussi une certaine maturité", explique Patrick Michel. C'est avec cette piste et la "production de vins plus friands" que Patrick Michel entend gagner le cœur des nouveaux consommateurs et des millennials. Le vigneron sait que la filière est à la croisée des chemins. Elle doit faire face à de multiples enjeux. "Bien sûr qu'il faut anticiper et proposer autre chose, mais sans tout bouleverser non plus. Du moins pour l'instant. Mais il est certain qu'à l'avenir d'autres terrains de découvertes seront à explorer", concède le vigneron camarguais.
TÉMOIGNAGES
Malgré un ralentissement de la consommation, Odile Couvert, vigneronne à Violès, ne perd pas de vue l'intérêt des consommateurs qui veulent découvrir de nouveaux horizons.
Fini les rouges forts et très marqués. Odile vinifie aussi depuis quelques années déjà des vins blancs et rosés. Et, tout récemment, elle s'est mise à produire des vins pétillants, de plus en plus demandés.
© Crédit photo : Erick Saillet
Au pied des dentelles de Montmirail et du Mont Ventoux dans le Vaucluse, le Domaine de l'Odylée exploite 17 hectares de terres, dont 10 ha de vignes plantées en AOP Côtes du Rhône. Odile Couvert, propriétaire depuis dix ans, vend essentiellement ses vins aux particuliers et à l'export. Elle appréhende ces deux marchés complémentaires avec les mêmes produits.
La vigneronne - qui observe les tendances de consommation des vins évoluer - estime que la solution passe par la diversification des couleurs, des formats et une offre de vins moins forts en alcool. La première initiative prise par la productrice a consisté à "ne plus faire seulement du rouge", dans un terroir où la couleur prédomine historiquement. "Dans notre secteur, il se produit des rouges plutôt corsés, puissants à base de syrah et de grenache. Je pense qu'il faut aller aujourd'hui vers des vins différents", rapporte l'intéressée.
Fini donc les rouges forts et très marqués. Odile vinifie aussi depuis quelques années déjà des vins blancs et rosés. Et, tout récemment, elle s'est mise à produire des vins pétillants de plus en plus demandés, bien au-delà de l'appellation des Côtes du Rhône. Elle a également constaté une modification des habitudes de consommation, ce qui l'a conduit à s'adapter à cette demande sur de nouveaux formats. "J'ai produit cette année un vin rouge pétillant dans un contenant de 25 cl. Un produit spécialement développé pour les Jeux olympiques et baptisé 'Bleu Blanc Bulles'", rapporte Odile Couvert.
L'initiative lancée par la vigneronne a très bien fonctionné, ce qui l'encourage à décliner l'idée avec un rosé pétillant sur ce format l'an prochain. La vigneronne - qui s'essaye à de nouvelles idées chaque année - a d'abord investi une boutique à la gare TGV d'Avignon où elle vend son vin. Et, cette année, c'est avec un nouveau concept qu'elle a voulu saisir l'opportunité des festivités olympiques. "J'ai choisi de vendre mon vin dans un pop-up store [magasin éphémère, ndlr] à Marseille, proche du Vieux-Port, qui a aussi très bien fonctionné." Elle a tenu cette boutique du 1er juillet au 17 août, en misant avec succès sur les blancs et les rosés après la fin des Jeux.
Vendre du vin de façon temporaire l'été l'a séduite, et Odile souhaite pouvoir renouveler l'expérience l'an prochain. "Pour une productrice qui vise le particulier comme moi, il faut pouvoir être plus visible et multiplier les points de vente dans la mesure du possible", ajoute- t-elle.
Odile Couvert est aussi persuadée qu'il peut être intéressant de récolter plus tôt, pour proposer des vins moins alcoolisés. "Les consommateurs veulent des produits plus fruités, moins puissants, moins taniques et moins alcooliques. Et c'est ce que j'essaye de produire, en ramassant mes raisins un mois et demi avant tout le monde", rapporte-t-elle. La productrice s'emploie donc à produire des blancs autour de 12 % et des rouges en dessous de 14 %. "Mais ce n'est pas facile car on est contraint par le climat", admet-elle.
"Nouvelle dans le métier", la vigneronne reconnaît qu'il lui est aussi peut-être plus facile que d'autres d'envisager une "nouvelle façon de produire du vin, de travailler différemment", mais reste convaincue qu'il faut "aller chercher ce qu'il se fait ailleurs et qu'il faut regarder les consommateurs".
Témoignages
La déconsommation de vin est loin d'être un mythe. Reste à savoir ce qu'il est pertinent de mettre en place pour sauver les meubles et ses bouteilles.
Lionel Boutié et son fils qui, malgré les incertitudes, est sur le point de s'installer.
© Crédit photo : AL
Avec un petit secteur chanceux d'avoir eu un peu d'eau cette année, mais aussi comparé à l'année passée, Lionel Boutié - vigneron du domaine Ricardelle de Lautrec, à Coursan - reste prudent quand il est question du marché.
"Il n'y a aucun débouché pour le vrac. Ça fait déjà deux ans que ce circuit n'est plus viable. Même l'année dernière, sur les 1 200 hectolitres habituels, on n'a pu faire partir que 200 hectolitres."
Le vigneron développe en priorité sa gamme de vins nature qui, pour l'heure, "marche bien et suit son cours, majoritairement à l'export, mais aussi de façon plus marginale en local".
Mais globalement sur sa gamme, il enregistre des pertes de marché. "Pour se positionner, il faut savoir faire de bonnes choses, et aujourd'hui, il se fait de tout et n'importe quoi". Pour légitimer le savoir-faire, de son côté, le domaine a fait le choix d'être labellisé 'Vin méthode nature', avec une charte de vinification et un encadrement solide. Ces garde-fous permettent de savoir a minima "ce que l'on boit et le travail qu'il y a derrière".
Depuis maintenant quatre ans, le domaine se lance également dans le vin effervescent. "Même si ce n'est pas évident à mettre en place, on en fait de plus en plus et on gagne des marchés. Donc, on continue à développer."
Produit plus frais, moins lourd et moins alcoolisé pour coller à la demande actuelle qui tangue plutôt sur des vins fruités et légers. C'est donc l'objectif du domaine.
C'est pourquoi, en plus d'avoir des profils de vins en constante évolution, de nouveaux cépages ont été implantés sur les terres de l'exploitation, comme le vermentino, récolté pour la première fois cette année, ou encore du grenache et du cinsault, pour adapter la gamme sur le rouge et le rosé. "Cela permet de faire des choses plus légères".
Autre nouveauté pour gagner des parts de marché : le domaine produit depuis quelques années un vin blanc effervescent intitulé 'Pet'Nat', qui connaît un bon succès auprès du marché. "C'est un produit qui marche bien. Mais là encore, on est sur des petits volumes, que l'on développe petit à petit". Cependant, face au décrochage des rendements, "il faut espérer que le marché réponde sachant que, pour l'heure, on ne sait pas trop où on va."
Pour y voir plus clair dans un marché totalement flou, le vigneron compte sur ses équipes commerciales, tant sur le marché français que sur le marché asiatique où, d'après ce dernier, "il y a encore beaucoup de choses à faire et où ça bouge bien".
Le domaine travaille également avec la Norvège et loin de lui l'idée de se fermer les portes sur d'autres parties du globe, car pour le responsable viticole, "l'équation de la demande demeure la plus essentielle à résoudre".
Prochainement, le vigneron va développer des animations sur le domaine, afin de valoriser ses produits mais aussi d'améliorer la vente en direct. "On essayera de le mettre en place d'ici l'année prochaine. Mais il faut commencer petit et accueillir les gens comme il faut."
Le domaine de Ricardelle de Lautrec a également tenté de mêler art et vin, avec de nouvelles étiquettes, réalisées par une artiste locale, qui donnent à ses cuvées du corps et de la couleur.
Témoignages
C'est un fait : le vin se vend de plus en plus difficilement. Alors dans la cave coopérative du premier village bio de France, on travaille sur tous les fronts pour ne pas perdre de marché et conquérir de nouveaux consommateurs.
Fabien Mistre, président de la cave coopérative de Correns, est aussi président de Vignerons Coopérateurs Sud.
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Les vignerons coopérateurs de Correns, ce sont 32 producteurs du Centre Var qui totalisent 185 hectares de vignoble en AOC Côtes de Provence, AOC Coteaux Varois en Provence et IGP Var, pour une production annuelle moyenne de 9 000 hectolitres. À l'avant-garde, ils sont collectivement passés au bio dès 1997. Cette démarche fédératrice, inscrite dans une politique qualitative globale, a largement contribué au succès de la coopérative qui a, depuis, avancé sur la biodynamie, s'ouvrant ainsi un marché de niche bien valorisé.
Si la cave n'a aujourd'hui pas de stocks dans ses cuves, "on voit que le commerce ralentit, avec des effets de yoyos selon les périodes. Et puis le cours du vrac est en recul", observe Fabien Mistre, président des Vignerons de Correns.
Alors les équipes de la coopérative déploient toute leur énergie à contrer le phénomène de déconsommation, notamment en dynamisant ses trois points de vente, dont l'activité est suivie par une commission dédiée. "Avant l'été, on a décidé de mettre en place de nouveaux concepts pour faire venir les gens dans nos caveaux de vente. Dans celui du Val, qui a l'avantage d'être central, on a fait plusieurs fois par mois des soirées dégustation autour de cuvées spécifiques, avec de quoi manger et des groupes de musique. Cela nous a permis d'attirer 150 personnes à chaque fois. On s'associe aussi aux manifestations des villages du secteur. On a par exemple collaboré avec un festival électro sur Correns, qui fait venir beaucoup de jeunes", explique Fabien Mistre.
L'initiative doit désormais être déclinée sur la période hivernale. Et dès le printemps prochain, les Vignerons de Correns souhaitent dynamiser davantage encore, avec des soirées à thèmes. "On prévoit de faire venir des food-trucks, de proposer paella ou aïoli. L'idée, c'est que ce soit festif. Après, selon les thèmes, on sait qu'on touchera des publics plus ou moins jeunes", éclaire le président de la cave.
En parallèle, la coopérative travaille à diversifier le marché de fruits et légumes, accueilli les samedis matin aux portes du point de vente du Val, avec de nouveaux produits. Dans le même esprit la coopérative va se lancer dans l'épicerie fine. "On souhaite mettre en avant des producteurs et artisans locaux qui viendraient présenter leurs productions. Si le client entre chez nous pour du fromage ou de la charcuterie, on peut lui conseiller le vin qui va bien", justifie Fabien Mistre.
Sur Correns, le déménagement de la boutique de la cave est en réflexion. "Notre positionnement à Correns est plus compliqué. Mais nous pourrions déménager dans un ancien moulin, qui a beaucoup de cachet, à l'entrée du village. Le bâtiment nous appartient et ce serait éventuellement l'occasion d'y faire venir des artisans pour proposer de la restauration", précise Fabien Mistre.
La coopérative a aussi investi il y a une douzaine d'années dans un point de vente à Aups, que les Vignerons de Correns tiennent à pérenniser. "C'est un secteur où il y a peu de points de vente de vin et qui a l'avantage d'être situé à un endroit stratégique, où le passage touristique sur la route du lac de Sainte-Croix est important. Nos vins bio et tourisme vert vont bien ensemble. Ça nous permet d'étendre notre zone de chalandise et d'être visibles dans des bars, des restaurants, des hôtels."
Le e-shop, créé en période de Covid avec des aides de la Région Sud, représente enfin aujourd'hui le chiffre d'affaires d'un quatrième magasin. "Il a explosé. On a donc mis une salariée dessus. On touche beaucoup le nord de la France avec des commandes groupées. Le vin peut partir par palette. On va maintenant y développer l'export. C'est plus compliqué au niveau des douanes, mais il y a un marché et on ne veut pas passer à côté."
Les Vignerons de Correns essaient également d'innover en termes de produit, avec une cuvée vegan hier, du jus de raisin aujourd'hui, et pourquoi pas un vin nature demain.
"Notre force, c'est d'avoir su étaler les investissements dans le temps, de faire en sorte de nous renouveler. Malgré la conjoncture, on continue. Il ne faut pas se retrouver à la traîne, mais au contraire essayer d'être à la pointe dans tous les domaines", résume Fabien Mistre, qui veut rester positif. "Il faut avoir des projets, aller chercher de nouvelles clientèles, s'interroger sur notre fonctionnement aussi, en se posant la question de la mutualisation de compétences par exemple. J'ai espoir, d'autant que l'on fait de bons vins", conclut-il.
Témoignages
L'idée est partie de la création d'un rayon bière au caveau. À Euzet, les Vignerons des Capitelles ont commencé avec quelques références et en sont arrivés à une quarantaine, jusqu'à envisager de brasser la leur. Depuis avril, avec 'La base', c'est chose faite.
Aude Tisseraud, directrice de la cave coopérative d'Euzet dans le Gard, 'Les Vignerons des Capitelles', accompagnée d'un coopérateur.
© Crédit photo : Leif Carlsson
Elle s'appelle 'La base'. Elle est arrivée dans les rayons du caveau en avril, et c'est la première bière brassée par les Vignerons des Capitelles, à Euzet. Un projet qui n'arrive pas par hasard, puisqu'il a pris ses racines dans une tentative commerciale partie il y a quelques années. "Nous avions bien vu qu'il y avait une appétence pour la bière, même dans nos cercles d'amis respectifs. Et pourtant, les quelques personnes ne buvant pas de vin qui franchissaient les portes du caveau restaient des accompagnateurs qui, de fait, repartaient les mains vides", se souvient Aude Tisseraud, directrice de la coopérative.
Alors pour avoir quelque chose à leur proposer, la cave s'est rapprochée de brasseries artisanales afin de leur présenter un rayon bières. L'engouement est immédiat, "si bien qu'on est assez vite montés à une quarantaine de références, et que des clients ont commencé à entrer au caveau uniquement pour notre rayon bières. C'est là qu'on s'est dit, pourquoi ne pas faire la nôtre", retrace la directrice.
Entre l'affront et l'audace, il n'y a qu'un pas. Il a fallu convaincre les 40 coopérateurs de se lancer dans le projet. Mais après une première tentative, puis deux, ils ont fini par y aller.
"Quitte à le faire, il fallait en revanche donner du sens à ce projet. Nous avons plusieurs de nos viticulteurs qui sont en polyculture, alors pourquoi ne pas semer notre propre orge brassicole ?" Pour le moment, et pour coller à la petite production actuelle, seuls deux frères sèmeront, en novembre, les quelques premiers hectares. Mais l'idée va plus loin : "À moyen terme, nous pourrions proposer le surplus d'orge à des brasseries locales. Nous pourrions même souffler à ces structures de planter de l'orge brassicole, pour les fournir d'un approvisionnement local". De cette manière, la démarche vient également contribuer au tissu local et à son économie, en plus de potentiellement offrir une nouvelle source de revenu pour les agriculteurs.
Pour la directrice, le poids social du projet est indéniable, d'autant que, même s'ils ne plantent pas tous de l'orge, les vignerons s'impliquent : "La bière est une production qui peut se faire toute l'année, ce qui permet aux vignerons qui le souhaitent de s'investir dans le processus de production, ce qui n'est pas habituel pour des coopérateurs".
Installer une micro-brasserie au sein de la cave permettait également de redonner vie à l'ancien quai de réception, qui ne recevait plus de raisins depuis des années. "En y installant un nouveau projet coopératif, nous continuons à raconter une histoire", se plait à penser Aude Tisseraud, depuis devenue brasseuse aux côtés des vignerons.
Pour l'heure, les premières bouteilles de blondes ont été réalisées à l'aide d'orge et de houblon français, tout droit venu d'Alsace. Avec ses 4,5 % d'alcool, elle reste légère, douce et peu amère. Une american pale ale qui propose des notes de fruits et de malt et a déjà commencé à séduire les clients.
Pour l'IPA, si l'orge reste français, le houblon est quant à lui américain, "rendons à César ce qui est à César", plaisante la directrice. Bien évidemment la question de produire leur propre houblon s'est posée, mais en plus d'être un autre métier, il s'agit surtout d'une production qui demande du matériel... Et de l'eau ! "Dans le nord du Gard, on en manque clairement. Alors forcément, le jour où on y aura accès, elle ira en priorité à la vigne", explique Aude Tisseraud, réaliste. Mais si un jour cela devenait possible, proposer une bière dite "de récolte", avec l'orge et le houblon des producteurs des Capitelles, serait évidemment envisagée, même si dans ce projet, personne ne vise un déploiement à grande échelle.
Avant d'en arriver là, d'autres perspectives restent ouvertes, notamment celle d'une bière à base de jus de raisin. En échangeant avec la cave de Roquemaure, déjà lancée depuis quelques temps et bien que dans une démarche différente, la directrice découvre de nombreuses possibilités dans ce milieu sympathique qui appréhende la production différemment. "C'est comme s'il n'existait aucune concurrence entre les brasseries", pointe-t-elle. Et la concurrence avec le vin d'ailleurs ? "Au caveau, ça attire des clients différents, nouveaux, et finalement ce sont deux productions qui ne se vampirisent pas. On l'a vu sur les salons avec monsieur qui préférait prendre un verre de vin, et madame un verre de bière. En proposant les deux, et bien on garde monsieur et madame", affirme Aude Tisseraud. De quoi rester optimiste pour dynamiser le caveau.
Pépinière viticole
La crise viticole impacte bien sûr les pépiniéristes français, réunis en congrès à Angers, du 23 au 25 octobre. Leur président, David Amblevert, plaide pour l'anticipation et engage la filière à continuer de travailler de manière collective et résolue pour construire l'avenir.
Dans le cadre du plan de filière, la Fédération française de la pépinière viticole (FFPV) demande des aides à l'arrachage et à la restructuration pour implanter du matériel végétal innovant.
© Crédit photo : Grégoire Édouard
Le 21e congrès de la Fédération française de la pépinière viticole (FFPV) s'est ouvert le 23 octobre sur un constat clair : la profession n'est évidemment pas épargnée par la crise qui frappe l'ensemble de la filière viticole. L'activité des pépiniéristes, qui ont déjà diminué significativement les mises en œuvre, s'en ressent.
"Le nombre d'invendus et de repiqués a doublé cette année. En anticipation de la baisse de la demande, on a greffé 35 millions de plants de moins que l'an dernier. On est à 195 millions, contre 220 millions. Mais la qualité du service et l'exigence sanitaire restent intactes", pose David Amblevert.
"Malheureusement, face à cette situation, les trésoreries de nos exploitations se tendent fortement, et certains vont se trouver contraints d'arrêter le métier. Il y a des situations humaines préoccupantes et un dispositif d'accompagnement sera nécessaire", poursuit le président de la FFPV. Avant de pointer "un climat anxiogène d'incertitudes".
"De fait, le potentiel de production va baisser avec les plans d'arrachage amorcés, comme dans le Bordelais, et annoncés dans d'autres régions. Bruxelles vient de valider pour la France l'arrachage de 30 000 hectares de vignes pour 120 millions d'euros. Parallèlement, la filière demande un soutien à la replantation différée, dont le financement serait issu du volet restructuration de l'OCM viticole, ce qui amputerait les budgets normalement alloués au renouvellement du vignoble. Avec des conséquences inéluctables pour notre filière", développe David Amblevert. Pour le président de la FFPV, il y a donc "urgence à connaître les arbitrages pour gérer en connaissance de cause les futures mises en œuvre", et "les mesures de restructuration doivent être maintenues".
Dans le cadre du plan de filière, la pépinière viticole réclame par ailleurs une mesure de soutien à l'arrachage pour les vignes mères de porte-greffes de plus de 30 ans - qui représentent 10 % du parc actuel, soit environ 250 ha - à hauteur de 3 000 €/ha, ainsi qu'une aide majorée à la restructuration pour les vignes mères de greffons, "afin d'implanter des variétés résistantes, innovantes et patrimoniales, pour que la filière dispose du matériel végétal jugé stratégique dans les meilleurs délais".
Sans occulter le contexte, David Amblevert exhorte ainsi la pépinière française à poursuivre le travail engagé pour construire l'avenir. "Oui, demain, il y aura moins de vigne. Mais il faudra entretenir et adapter le vignoble avec du matériel végétal innovant", martèle-t-il.
Et le premier défi reste celui de l'adaptation au changement climatique, "qui met l'innovation variétale et l'évolution des cépages au cœur des débats. Il y a un véritable chamboulement. On le voit encore avec les aléas - gel, grêle, sécheresse, mildiou, coulure... - qui ont marqué cette saison viticole. Le plant de vigne, premier maillon de la production, est une des réponses sur laquelle nous continuons de travailler avec force", déclare le président de la FFPV.
À ce chapitre, le congrès de la fédération a été l'occasion de présenter les évolutions de la marque Entav-Inra, née en 1995 de la collaboration entre l'Institut français de la vigne et du vin (IFV) et Inrae.
Rebaptisée Entav by IFV INRAe, celle-ci se décline désormais en trois catégories : 'Entav sélection', afin de renforcer la sélection de cépages locaux et étrangers pour compléter la gamme des grands cépages régionaux ; 'Entav création', pour développer les variétés dites résistantes au mildiou et à l'oïdium et, à l'avenir, à d'autres pathogènes comme le black-rot ; 'Entav diversité', qui vise à développer une offre complémentaire à la sélection clonale, en allant puiser du matériel végétal dans les conservatoires. "Nous avons 180 sites conservatoires dans le pays, avec plus de 20 000 souches de différents cépages et de différentes sélections. C'est une réelle opportunité pour répondre collectivement à la demande de diversité génétique au vignoble, et la pépinière française est aujourd'hui en capacité de proposer des sélections massales avec les meilleures garanties sanitaires", éclaire David Amblevert.
Dans le même esprit, il souligne le dynamisme de Vitipep's, la marque collective des pépiniéristes de France, qui rassemble trois quarts des plants mis en œuvre dans le pays. "C'est un engagement fort sur la traçabilité et la qualité de nos plants, un engagement très actif sur l'accompagnement et la formation des pépiniéristes sur les questions techniques et réglementaires. Les résultats sont là. C'est une très belle réussite collective et il faut poursuivre dans ce sens", appuie David Amblevert.
Avec un souci permanent de performance technique, sanitaire et économique, il insiste aussi sur l'importance du soutien des Conseils régionaux dans le cadre du plan de compétitivité de la pépinière viticole. "Il y a dix ans, les Conseils régionaux ne nous connaissaient pas ou peu. Depuis, via différents dispositifs sur le machinisme ou les pratiques, on a pu investir plus de 15 millions d'euros en 10 ans, avec un soutien de 30 % en moyenne", salue-t-il.
La Fédération reste mobilisée sur les questions réglementaires. Associée au Plan d'action stratégique pour l'anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada), la FFPV craint de voir différentes molécules utilisées dans la lutte contre le mildiou, le black-rot ou la flavescence dorée disparaître, et défend le credo "pas d'interdiction sans solution" aux côtés des principaux acteurs de la filière.
David Amblevert se réjouit par ailleurs du dialogue instauré avec les services de la Direction générale de l'alimentation du ministère de l'Agriculture concernant la flavescence dorée. "On a fait des essais de traitements insecticides de nos vignes mères de porte-greffes avec l'IFV, de façon à faire reconnaître nos méthodes de pulvérisation. Les résultats sont en cours d'analyse", indique le président de la FFPV. Avant de rappeler que le double Tec (traitement à l'eau chaude) des pieds de vigne ne peut plus être imposé s'il n'y a pas de problème sanitaire pendant le cycle de production. "Tout cela doit être très clairement mentionné dans le nouvel arrêté de lutte contre la flavescence dorée", assure-t-il.
La Fédération française de la pépinière viticole alerte enfin sur la question de la dénomination variétale, et les ambiguïtés générées par l'utilisation de termes rappelant des variétés emblématiques pour nommer de nouvelles variétés, étrangères notamment. "Cela s'apparente à de l'usurpation, ou crée tout du moins de la confusion dont on ne peut se satisfaire. La réglementation actuelle manque d'efficacité à ce sujet. Nous sommes donc défavorables à l'utilisation de termes rappelant des variétés emblématiques pour la dénomination de nouvelles obtentions", défend David Amblevert, avant de conclure, en invitant la pépinière viticole française à porter des ambitions techniques et collectives toujours plus grandes.
Cryptoblabes gniediella
Régulièrement, les instituts techniques appellent les agriculteurs à répondre à des enquêtes. Une des dernières en date concerne Cryptoblabes gnidiella, la pyrale du daphné, et son impact sur les vignes de l'arc méditerranéen, portée notamment par l'Institut français de la vigne et du vin.
Le Cryptoblabes investit de plus en plus l'intérieur des terres depuis le littoral méditerranéen.
© Crédit photo : CA 83
Présent depuis une dizaine d'années maintenant, les vignerons ont vu l'aire de présence de Cryptoblabes gnidiella s'agrandir au fil des ans : situé initialement sur la frange littorale, le ravageur a progressivement gagné l'intérieur des terres, et se retrouve aujourd'hui indépendamment à Limoux ou au sud de l'Ardèche, en passant par la Vallée du Rhône et les Terrasses du Larzac, non sans avoir fait quelques incursions en Provence. Son impact varie selon les territoires et les conditions agroclimatiques.
En 2023, l'Institut français de la vigne et du vin (IFV) et ses partenaires techniques1 lançaient une enquête pour évaluer son impact économique auprès de l'ensemble des viticulteurs des vignobles du pourtour méditerranéen. En février dernier, une note de synthèse - rédigée par Nicolas Constant (IFV) et Lionel Delbac (Inrae) - était diffusée décryptant les 208 réponses récoltées (entre le 28 septembre et le 27 octobre 2023) et exploitables, représentant une surface de 13 510 hectares.
Premier enseignement, et non des moindres : le ravageur est mal connu. En effet, 44 % des viticulteurs déclarant des dégâts de Cryptoblabes sur certaines de leurs parcelles expliquent ne pas savoir identifier le papillon ; et "66 % de ceux qui n'ont jamais vu le ravageur pensent ne pas pouvoir identifier ni les adultes ni les larves", rappelle la note de synthèse de l'IFV. Ces données renseignent sur la nécessité de former les vignerons à la reconnaissance et à l'identification des différents stades de développement du ravageur.
Deuxième information : 63 % des 208 réponses ont déclaré des dégâts de Cryptoblabes sur certaines de leurs parcelles dans les 5 dernières années. Une preuve supplémentaire de l'expansion de la pyrale "puisqu'en 2003, les premiers dégâts significatifs concernaient des vignes à moins de 10 km de la mer". Vingt ans plus tard, "des papillons ont été capturés dans la Drôme et des larves ont fait des dégâts en Ardèche, à 110 km du littoral".
Troisième point : les pertes quantitatives de récolte sont en moyenne estimées à environ 5 % par an sur l'ensemble des vignes, mais peuvent aller jusqu'à 20 % dans les parcelles les plus attaquées, "sans compter les pertes qualitatives dues à la dégradation de l'intégrité des raisins ou à l'anticipation de la date de vendange", précise la note.
En termes de lutte, 75 % des vignerons déclarant des dégâts de Cryptoblabes protègent leur vignoble : près de 44 % le font dans le cadre d'une lutte conjointe avec l'eudémis, et 32 % choisissent des traitements spécifiques. Les interventions sont majoritairement déclenchées par le piégeage des adultes, à l'aide de différents pièges. Pour rappel, il existe actuellement sur le marché mondial différents types de piège : à phéromones, collant, à lumière ou avec des piégeages intégrés avec des produits insecticides homologués. En conventionnel, "89 % des viticulteurs optent des produits à base d'émamectine. La lambda-cyhalothrine, l'étofenprox, le spinetoram et l'esfenvalérate sont les autres produits les plus utilisés".
De plus, 76 % des vignerons utilisant un insecticide de synthèse dans leur stratégie de lutte la pyrale sont par ailleurs "satisfaits de l'efficacité de leurs traitements".
Pour les vignerons bio, la satisfaction est plus faible, puisqu'ils ne sont que 43 % à se satisfaire de l'efficacité des produits autorisés en agriculture biologique, sachant qu'ils déploient en moyenne 2,5 traitements, contre 1,9 en conventionnel.
Enfin, le coût de la protection varie que l'on soit en bio ou conventionnel : en bio, 63 % des viticulteurs traitent avec du spinosad seul ; 28 % le combinent avec du Bacillus thuringiensis ; et 6 % utilisent du B. thuringiensis seul. 5 % des viticulteurs déclarent poser des trichogrammes en complément d'autres traitements insecticides.
Le coût moyen de la protection 100 % bio s'élève à 149 € contre 110 € dans les stratégies incluant au moins une application de substance active non AB. Ces moyennes dissimulent de fortes variations. En bio, les viticulteurs dépensent entre 50 € (1 traitement) et 430 € (pour 6 traitements et une pose de trichogrammes).
En conventionnel, le coût de la protection varie de 36 à 330 €.
L'enquête fournie également des informations quant aux types de parcelles viticoles touchées. Ainsi, ces dernières "se caractérisent surtout par une vigueur moyenne à forte, avec des grappes compactes, et la présence de cépages noirs, tels que le grenache et la syrah. À vigueur comparable, les cépages tardifs semblent plus impactés que les cépages précoces", pointe la note, précisant par ailleurs que les viticulteurs citent régulièrement l'humidité du millésime comme facteur aggravant de la pression du ravageur.
Les auteurs précisent également que"les cépages blancs dans leur ensemble sont cités comme moins sensibles, sauf dans des situations de forte vigueur"et s'interrogent aussi sur des facteurs de risque : cochenilles et plus largement maladies et ravageurs induisant une dégradation des raisins et offrant donc une porte d'entrée physique à Cryptoblabes.
Eau
Face au changement climatique et à la nécessité de lutter contre le stress hydrique, des techniques alternatives existent et répondent en partie à cette réduction d'apport en eau. Plus ou moins faciles à mettre en œuvre, elles doivent ouvrir de nouvelles réflexions agronomiques, dans lesquelles il faudra intégrer l'irrigation, vitale pour le fonctionnement du sol, l'état physiologique des plantes et les objectifs agronomiques, œnologiques et de marché.
Pour lutter contre le stress hydrique de la vigne, l'irrigation reste un levier à actionner, sous condition d'avoir évidemment l'eau à disposition sur la parcelle.
© Crédit photo : CZ
Face au changement climatique, il va falloir faire avec moins d'eau quand le végétal est en demande. Heureusement, les techniques alternatives existent et sont d'ores et déjà étudiées et mises en place dans des vignobles expérimentaux et de production. Ainsi, au Domaine de Piolenc, dans le Vaucluse, 7,50 hectares de vignes permettent de tester différentes stratégies de production. "Nous y travaillons évidemment les techniques alternatives permettant de réduire les apports en eau. Même si on travaille à réduire les apports, de l'eau, il en faudra toujours pour faire tourner la photosynthèse", rappelle François Berud, responsable du service 'Vigne et vin' à la Chambre d'agriculture de Vaucluse.
Limiter la contrainte hydrique, retarder la maturité, réagir face au stress thermique, maintenir les rendements et la qualité... Face à la nécessité de réduire les apports en eau, sous couvert d'un arrêté sécheresse, d'une recherche de qualité, d'un manque d'eau naturel lié aux pluies... l'équipe viticulture a lancé des expérimentations sur sept leviers d'action : les filets d'ombrages, l'agrivoltaïsme, la micro-aspersion et la brumisation, la conduite du feuillage, l'irrigation et le matériel végétal. Chacune à leur niveau, ces alternatives apportent une part de la réponse à donner, en fonction de l'environnement dans lequel est située la parcelle et de son contexte pédoclimatique. Les filets d'ombrage sont travaillés depuis 4 ans sur le domaine, avec deux modalités (50 % d'ombrage et apport de 30 mm ; 75 % d'ombrage et apport de 10 mm), posées après nouaison et comparées à une modalité en irrigation dite de confort (70 mm). "En 2021, on a consommé entre 25 % et 75 % de moins d'eau grâce aux filets d'ombrage, avec en moyenne entre 25 % et 30 % d'économie d'eau."
La technique est certes chère, guère valorisante pour les paysages, mais elle fonctionne donc. La question actuellement posée par l'expérimentation est celle du devenir à moyen terme de la productivité, "avec une fertilité - un nombre de grappes par cep - en baisse. Sur les modalités ombragées, on a moins de production avec des poids par cep qui baissent. Donc on a bien des économies d'eau, mais on enlève aussi de la production, et celle qui reste présente une fertilité inférieure", résume François Berud. L'agrivoltaïsme est testé sur le site de Piolenc avec une infrastructure qui, depuis son installation, a vu des évolutions conséquentes proposées par les acteurs de la filière. Sur Piolenc, 2 blocs de 300 m² sont installés avec mesure de stress hydrique. "La baisse de consommation atteint en moyenne 20 à 25 %. L'an dernier, nous avons mis en place un essai sans irrigation, avec des résultats prometteurs à l'instant 't'. Mais on a des sols adaptés avec une belle réserve hydrique", précise le chef de service.
La micro-aspersion et la brumisation sont également évaluées dans les essais - elles sont installées quand les températures dépassent les 30°C -, mais les résultats sont moins prometteurs : "Nous n'avons pas réussi à améliorer les performances de fonctionnement du végétal, sans compter que l'on a finalement mis beaucoup d'eau [> 300 mm, ndlr]. À l'heure actuelle donc, et dans nos modalités d'essais, les résultats ne sont pas intéressants".
La conduite du feuillage fait également partie des questions posées par la Chambre d'agriculture. "Nous sommes partis sur un système simple où on laisse retomber la végétation. Les résultats ne sont pour l'instant pas probants. On a toujours des grappes au soleil après défoliation." Les essais se poursuivent néanmoins avec différentes mesures complémentaires : le coût du relevage, important au printemps mais qui reste à quantifier ; un écimage moindre ; une intervention plus précoce...
La densité fait aussi partie du lot des interrogations. Sur Piolenc, elles varient de 2 222 à 10 000 ceps/ha dans les essais. "Nous avons pu observer que les très hautes densités calaient plus vite et arrêtaient de pousser avant les autres en cas de sécheresse. Mais dès que l'on dédensifie, on a des productivités qui baissent, même si on améliore un peu la tolérance à la sécheresse", résume le Vauclusien.
Pour lutter contre le stress hydrique de la vigne, l'irrigation est évidemment un levier à actionner, sous condition d'avoir évidemment l'eau à disposition sur la parcelle. "Dans 90 % des cas, quand on arrose, on apporte entre 0 et 100 mm, avec une augmentation du rendement qui varie de 0 à 50 %. Donc, même quand on arrose, on atteindra un plafond maximal de 50 %, sachant qu'en moyenne, c'est même plutôt 25 %. La bonne nouvelle, c'est que cela se fait avec des doses d'apports qui restent quand même très raisonnables. L'important, c'est plus la date et le stade d'apport. Mais il faut que l'État et les citoyens entendent qu'avec peu d'eau, on sauve le végétal. Et les vignerons, qu'ils prennent un risque en apportant trop ou qu'ils placent mal les apports."
Ces données optimales sont recherchées et doivent d'ailleurs venir compléter les dossiers viticoles et hydriques (voir encadré), "car elles permettent notamment d'affiner les besoins des territoires pour calibrer les réseaux. Il faut donc penser l'irrigation comme un régulateur de rendement". Mais avec ou sans eau, on aura toujours les variations annuelles liées au climat.
Enfin, la variété reste un levier et les variétés anciennes autochtones - terret, picpoul, brun argenté, counoise... - peuvent en ce sens retrouver toute leur utilité, tout comme les cépages étrangers (les plantations ont été faites en 2023). "Des expérimentations sont lancées depuis plusieurs années sur des variétés tolérantes aux maladies et les nouvelles variétés résistances en cours de tri sont aussi évaluées au prisme du changement climatique." Ont ainsi été plantées 22 variétés suivantes dont 12 en rouge - sciaccarello (origine corse), morrastel (Espagne), agiorgitiko et xinomavro (Grèce), calabrese, montepulciano, niellucio-sangiovese (Italie), cabestrel (métis), piquepoul, grenache noir et carignan (patrimonial) et brun fourca (Provence) - 2 en rosé - moschofilero et roditis (Grèce) - et 8 en blanc : verdejo, parrellada et xarello (Espagne), assyrtiko (Grèce), alvarinho (péninsule ibérique ouest) et bourboulenc, carignan et piquepoul au titre des variétés patrimoniales. "Sur les porte-greffes, les travaux sont plus compliqués", concédait François Berud.
Enfin, des travaux sont en préparation : outre le suivi des essais en cours, l'expérimentation territoriale cherche aussi à renforcer les outils de connaissance du zonage de la contrainte hydrique (répartition et spatialisation du stress hydrique, ndlr). Par ailleurs, des essais d'irrigation enterrée et/ou tardive ont été mis en place à Piolenc en 2023, avec toujours des essais de conduite de la végétation.
"Dans tous les cas, il sera difficile de se passer d'irrigation. Il faut que la photosynthèse puisse avoir lieu, tout en permettant au vigneron de lutter contre les canicules. Et il faut aussi soutenir la diversification de la gamme (blanc, rosé, rouge à moindre teneur en alcool...), en particulier dans les zones à faible réserve hydrique", conclut le chef de service.
filière de réemploi
La consigne en soi n'est pas un phénomène nouveau. Cependant, la société Oc'Consigne, qui fait renaître la filière de réemploi au sein de la métropole de Montpellier, en est bien un. Zoom sur celle qui veut restructurer une filière qui a du sens.
La loi Agec fixe un objectif de 10 % d'emballages réemployés à l'horizon 2027, contre moins de 2 % aujourd'hui.
© Crédit photo : Oc'Consigne
Casser ou réutiliser ? Deux écoles, mais plusieurs raisons d'y réfléchir. Le réemploi a le vent en poupe, c'est en tout cas dans l'air du temps, car cela répond à des enjeux environnementaux forts, mais aussi et surtout à des questions d'ordre économique moins visible aux premiers abords.
Depuis 2021, la société coopérative Oc'Consigne s'est spécialisée dans la consigne des bouteilles avec du matériel haut de gamme, qui lui permet de se positionner comme leader dans la partie sud du pays. "En 2023, nous avons fait l'acquisition d'une usine de lavage industrielle multi-contenants et multi-formats permettant de laver plus de 3 500 bouteilles par heure", introduit Sophie Graziani-Roth, co-fondatrice d'Oc'Consigne. En effet, après avoir fait transiter plusieurs millions de bouteilles, on peut dire que l'entreprise met les deux pieds dedans, sans hésitation. Reste qu'avant d'embarquer un maximum de personnes dans l'aventure, il est important de mettre quelques chiffres en lumière, déjà pour la défense de la cause environnementale, car les contradictions vont bon train concernant l'attrait du réemploi, notamment quand il est question d'eau.
Machine de fabrication allemande, cette dernière est optimisée pour réduire au mieux l'utilisation de cette ressource aujourd'hui rare. "Sur les machines anciennes, il fallait compter 2 litres d'eau pour nettoyer une bouteille de petit format. Aujourd'hui, il nous faut 0,25 cl d'eau pour nettoyer une bouteille d'un litre," poursuit-elle. Dès le départ, la société a fait le choix d'investir sur des machines de qualité pour justement offrir un service à la hauteur des metteurs en marché qui représentent de gros volumes, mais qui ne sont pas toujours en mesure de tout remplir et de tout stocker. "Parfois, les bouteilles sont à l'extérieur et il arrive très souvent que ces stocks soient abîmés par la pluie et les UV, devenant ainsi inutilisables, alors qu'elles sont neuves".
Problème de conception, de manutention et coût du stockage engendrent un gâchis qui peut vite se faire ressentir sur la trésorerie. "Si les vignerons ne se lancent pas dans le réemploi à bras-le-corps, on peut laver plein de bouteilles différentes, même celles qui sont neuves et mal stockées, ce qui leur permet de ne pas racheter des bouteilles neuves." Équipée et répondant aux besoins des producteurs, la société a donc pour ambition de relancer la filière de la consigne des bouteilles en verre avec la structuration complète, depuis l'accompagnement jusqu'à la mise en place de point de collecte.
Dans l'Aude, Oc'Consigne a noué un partenariat avec la Maison Paysanne pour réaliser une formation auprès des producteurs. "Le but était d'estimer le potentiel de développement d'une économie circulaire grâce à la consigne du verre, systématiquement alignée avec les ressources locales et les aspirations des participants", détaille Mélissa Martin, animatrice sur la filière du réemploi, à la Maison Paysanne de l'Aude. Après la formation, les producteurs possèdent tous les éléments importants à prendre en compte avant de se lancer, car au-delà des charges potentiellement supplémentaires, c'est aussi et surtout une question de temps et de logistique. "Ce sera forcément plus simple quand il y aura un réseau de collecte proche", estime la co-fondatrice. C'est justement l'ambition de France Consigne, groupement d'opérateurs du réemploi au niveau national : fédérer et mutualiser les bouteilles sur tout le territoire national. "Le frein reste le marketing, surtout quand il est question de bouteilles très spécifiques en termes de conception."
Cette dernière estime que "le réemploi permet de se protéger favorablement des instabilités extérieures".
Réemployer les bouteilles existantes semble tenir du bon sens écologique, mais qu'en est-il de la logistique ? Car, qui dit réemploi, dit eau, mais aussi énergie. D'après les chiffres de l'Ademe, réemployer représente une diminution de 51 % d'eau, 79 % d'énergie, 77 % d'émission de CO2, et surtout, 100 % de sable en moins. "Le réemploi est d'un point de vue environnemental, beaucoup plus sobre".
Or, quand on se penche sur le plan économique, ce n'est pas encore aisé de concurrencer le système en place, car les matières premières utilisées pour fabriquer des bouteilles ont un coût très bas, notamment parce que l'impact écologique n'est pas pris en compte, comme le sable par exemple. "Actuellement ce sont les éco-organismes et les collectivités locales qui payent cette matière première." Là où les questions se posent c'est de savoir qui finance quoi ? "Les éco-organismes sont financés par l'usage unique au travers d'une taxe payée par les metteurs en marché, qui mettent justement sur le marché les emballages à usage unique."
Si pour l'heure, les éco-organismes ne financent pas la filière de réemploi, pour la co-fondatrice, c'est peut-être une question de timing. "C'est difficile de passer du tout jetable au réemploi avec une filière si jeune." Malgré une vraie ambition politique en faveur du réemploi et des éco-organismes qui doivent utiliser une part de leur chiffres d'affaires pour soutenir la filière, force est de constater que"les choses ne vont pas vite". Néanmoins, dès 2025, une zone test dans plusieurs régions, dont les Pays de la Loire, la Bretagne et les Hauts-de-France, doit se mettre en place pour soutenir la collecte et le transport de bouteilles, afin de relancer la consigne à grande envergure. "En Languedoc-Roussillon c'est aujourd'hui plus de 100 points de collecte. C'est bien, mais il en faudrait beaucoup plus."Un maillage de territoire est donc nécessaire pour développer la consigne et dans cette position, qui de mieux que les acteurs de terrain pour faire boule de neige ?
C'est lors d'un voyage chez son importateur allemand que Fanny Boyer, vigneronne au Château Beaubois, en Costières de Nîmes, s'est intéressée à la consigne. "En Allemagne, la consigne n'a jamais été abandonnée."Depuis décembre 2022, elle s'est lancée dans le réemploi et la mise en place d'un point de collecte. Avec plus de six partenaires à travers le pays, c'est aujourd'hui plus de 15 % des vins qui sont vendus en réemploi. "De cette évolution, il y a des aspects positifs, négatifs et des choses à mettre en place."
L'avantage ? Un impact environnemental moindre car, comme elle le souligne de concert avec Sophie Graziani-Roth, "refondre une bouteille cassée, c'est utiliser 30 % de sable en plus sans compter l'eau et l'énergie". De plus, le verre représente actuellement plus de 30 % de l'impact carbone d'une exploitation alors, "faire du réemploi, c'est déjà diminuer d'un tiers son impact environnemental, c'est énorme".
L'inconvénient ? C'est une charge supplémentaire, de l'ordre de 10 000 à 15 000 euros, mais comme elle le précise bien, "quand on est précurseur c'est toujours comme cela". Cependant, cette hausse s'est fait ressentir sur les charges, mais aussi sur la commercialisation. "Il est certains que les cuvées vendues avec des bouteilles en réemploi ont accéléré les sorties en quantité et en rapidité."
À l'avenir ? Pour la vigneronne, il est indispensable de développer la filière au niveau européen. "L'Allemagne et la Belgique jouent actuellement le jeu de la consigne, mais si on avait une stratégie européenne sur le réemploi, ce serait génial."
TITRES et récompenses-
Oc'Consigne est récemment devenue lauréate du prix Adelphe. Ce prix récompense les initiatives exemplaires en matière de durabilité et de gestion des déchets, soulignant l'approche novatrice d'Oc'Consigne, dans le secteur est de l'Occitanie. La société a rencontré plus de 300 acteurs du vin dans le Languedoc, et a ainsi pris en compte les dynamiques, contraintes et enjeux de la filière, afin de construire des solutions adaptées pour développer le réemploi auprès des acteurs du vin (vignerons indépendants, caves coopératives, négociants, syndicats d'AOC et d'IGP, imprimeurs, embouteilleurs, distributeurs de verre et verriers, transporteurs, distributeurs, grossistes...). Le potentiel calculé sur la région concernée représente plus de 42 millions de cols récupérables (vendus en 75 cl et sur le territoire). Ce qui représente 3 % de la production du territoire.
Cryptomonnaie
Acheter son vin en Bitcoin ? La Part de l'Ange, caviste à Narbonne a décidé de franchir le pas. Pourquoi et comment ce nouvel actif trouve sa place dans de nombreux commerces en France et dans le monde ?
Pour les plus engagés, le paiement en Bitcoin peut également se faire de pair-à-pair avec le canal de paiement Lighting Newtork.
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Il y a deux catégories de curieux : ceux qui s'intéressent et ceux qui font. Thierry Guichard fait partie de la deuxième catégorie. Après avoir créé un café-librairie à Portiragnes (34), puis ouvert une cave à vins à Valras, il s'installe dans la ville de Narbonne. Il en fait un bar à vin hybride qui mêle cave et bar, avec des rencontres de vignerons et des acteurs culturels locaux. Que vient faire le Bitcoin au milieu de ces bouteilles plus emblématiques les unes que les autres ?
Il le reconnaît, "nous nous intéressons à tout ce qui se passe dans le monde. Sur la question du Bitcoin, le fait que ce soit un moyen de paiement qui se substitue aux banques nous paraissait suffisamment disruptif pour nous intéresser". En effet, qui aujourd'hui est en mesure de se passer d'un tiers de confiance quand il s'agit de paiement ? "Le monde d'aujourd'hui est sclérosé, entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui le veulent. Dans ces circonstances, la naissance d'un changement majeur de paradigme aura bien du mal à voir le jour." Faire une faille dans cette logique, en réorganisant les échanges marchands entre consommateurs, via l'utilisation d'une monnaie alternative... Voilà où le Bitcoin trouve sa place et prend tout son sens.
Présent depuis 2009, le Bitcoin trouve aujourd'hui son chemin dans la sphère économique, tant à l'échelle d'un pays où il a parfois cours légal comme au Salvador, qu'au sein de petites entreprises passant ainsi de zéro à 562 millions d'utilisateurs à travers la planète en seulement 15 ans. Il faut dire que l'essor du Bitcoin résonne tant et si bien qu'il est difficile aujourd'hui d'être ignoré. Les chiffres sont d'ailleurs évocateurs. Une récente étude montre qu'un Français sur huit en possède, 65 % d'entre eux ont entre 25 et 44 ans et que l'année 2024 a vu son adoption grimper de 33 % en seulement un an. Certains ont donc bien compris l'engouement qui entoure ce nouveau mode de paiement.
Dans le but d'attirer une nouvelle clientèle jeune et internationale, la ville de Talence, une commune de 44 000 habitants dans la banlieue de Bordeaux en Gironde a noué un partenariat avec l'entreprise française Lyzi qui propose une solution clé en main pour la mise en place d'un système de paiement alternatif en Bitcoin. C'est cette même entreprise, qui intègre plus de 85 000 points de vente que Thierry Guichard a choisi pour mettre un pied dedans et venir compléter son offre de paiement actuelle. "Pas besoin de terminal de paiement, une simple application permet de réaliser le paiement de façon instantanée et partout dans le monde. L'idée, c'est que ce soit très simple et facile d'utilisation".
En revanche, l'entreprise Lyzi prend une commission de 3 %, ce qui pousse Thierry Guichard à faire également 3 % de remise à sa clientèle dans le but de ne pas répercuter ses choix sur le prix final proposé aux clients. "Si une personne m'achète 100 euros de vin, je lui enlève trois euros, comme ça il paye le même prix que s'il payait en euros en lui permettant de contribuer à démocratiser l'utilisation du Bitcoin". Une fois le paiement reçu, la plateforme Lyzi se charge d'en faire la conversion en euros sur le compte du commerçant.
Loin d'espérer un bouleversement majeur de son activité, il défend l'idée d'innover, dans un monde qui reste souvent figé dans l'attentisme et la peur du changement. La désintermédiation via le Bitcoin comme nouvelle flèche à l'arc méditerranéen ?
Innovation
Et s'il était possible d'établir des modèles prévisionnels grâce à la détection des pathogènes avant que l'épidémie ne se mette en place ? C'est le pari des frères Douillet, poussant plus loin une démarche portée jusqu'ici par l'Institut français de la vigne et du vin (IFV). Grâce aux capteurs de spores disposés dans les vignes et à l'analyse ensuite réalisée en laboratoire, Antonin et Clément sont en mesure de proposer des modèles à sept jours pour mildiou, oïdium et prochainement black-rot.
Antonin Douillet, directeur général de DAC ADN, présente le fonctionnement du capteur de spores qu'ils ont développé avec son frère Clément. Il a la particularité d'être alimenté par l'énergie solaire.
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C'est à Vénéjan, dans le Gard, que s'est établie DAC ADN. Davantage bureau d'études que start-up, l'entreprise, fondée par les frères Antonin et Clément Douillet, profite pour le moment encore de l'incubateur de la CCI du département et du laboratoire d'analyses de l'université de Nîmes. Elle est cependant en cours de déploiement, afin de faire profiter de sa solution aux viticulteurs de la Vallée du Rhône. Le principe ? Disposer des capteurs de spores dans les vignes, afin de détecter mildiou et oïdium avant l'établissement de l'épidémie.
"À l'origine, je travaillais à l'Institut français de la vigne et du vin (IFV) de Bordeaux en tant qu'ingénieur d'expérimentation pour tester, entre autres, des alternatives aux traitements classiques sur mildiou, oïdium et botrytis. Au départ, nous faisions de la prévision avec la météorologie, mais n'avions pas d'outils", se souvient Antonin Douillet, directeur général de DAC ADN. Il accepte alors une proposition de thèse faite par Marc Raynal, ingénieur à l'IFV, dans l'optique de développer un outil de prévision permettant de capturer et quantifier les sporées de mildiou dans les parcelles viticoles. Après avoir soutenu son travail en février 2023, il s'interroge sur la meilleure façon d'aller au-delà des difficultés à transmettre les avancées de la recherche auprès des principaux intéressés : les agriculteurs.
C'est au cours de discussions avec Clément, son frère, et avec la ferme intention de revenir en Vallée du Rhône vers sa terre natale que leur bureau d'études voit ainsi le jour, et entre en activité dès avril 2023. "Le projet de suivi de mildiou a commencé avec l'IFV de Nouvelle-Aquitaine et son réseau de partenaires. Plusieurs points de détection ont été mis en place pour aborder la réflexion d'intégrer les données des sporées dans la lutte phytosanitaire. L'idée était ensuite de développer cette idée dans d'autres régions", poursuit le directeur. Et de son frère, président et co-fondateur de la structure, d'ajouter : "Nous avons avec l'IFV une approche de partenaire. Il était difficile pour eux de s'étendre sur d'autres territoires, nous arrivons donc en quelque sorte en support, avec une approche de modélisation différente."
Le mode de capture ne diffère pas de celui mis en place par l'IFV, seul le capteur change. "Ceux du fournisseur anglais de l'IFV présentent quelques contraintes pour une utilisation de routine en milieu agricole. Nous avons donc décidé de concevoir notre propre outil, dans une perspective low tech nous permettant de nous affranchir de la gestion des batteries qui demande une logistique trop importante pour les agriculteurs", explique Clément Douillet au sujet du capteur à bâtonnets rotatifs, qui fait particulièrement référence en matière de détection d'oïdium. Concernant le mildiou, c'est d'abord le capteur passif sous forme de buvard : "En sortie d'hiver, le mildiou se
trouve sous forme d'œufs, qui vont émettre les sporanges générant les premières infections sur feuille", rappelle le co-fondateur. Les deux capteurs se complètent donc puisque c'est ensuite le spore stick, le bras rotatif qui prend le relais. De fait, les deux sont positionnés ensemble en station de capture afin d'optimiser la détection : "Plus on capture, plus on a de données."
Si pour le moment les deux frères n'ont pas encore terminé le développement de leurs propres capteurs, des dépôts de brevets étant en cours pour ces instruments hybrides entre batterie et panneaux photovoltaïques (10 ou 20 W), ils ont tout de même commencé à collecter des données en utilisant le spore stick de la marque britannique et le capteur passif. "Ils nous permettent d'alimenter les modèles en attendant le déploiement de nos stations l'année prochaine", explique Clément Douillet. Au total, une dizaine de stations de capture sont installées en Bourgogne et Champagne, ainsi que cinq stations entre le Gard et le Vaucluse, à Vénéjan, Piolenc et Sainte-Cécile-les-Vignes notamment.
Le binôme cherche aujourd'hui à développer une mise en place collective plutôt qu'individuelle. "Notre objectif est d'entrer dans une démarche de réseau, en travaillant avec les coopératives et les syndicats pour permettre de réaliser les modélisations les plus précises possibles, par région, sous-région, voire pour déterminer des zones pédoclimatiques pertinentes", complète Antonin.
Ce qui rend possible ce fonctionnement, c'est notamment la pertinence des résultats dans un rayon de cinq kilomètres autour de la station de capture. "La station capte à l'hectare pour le mildiou, et un peu plus pour oïdium et blackrot, mais l'information issue du modèle se déploie au-delà", note le directeur général. Entre les données des sporées, les données météo et les différents stades phénologiques, le modèle se généralise en dépit des quelques disparités de détection pouvant être observées.
Les capteurs sont loués aux agriculteurs de mars à juillet et implantés dans les parcelles en concertation avec les principaux intéressés. Puis une quarantaine analyses sont réalisées tout au long de la saison avec des envois réguliers au laboratoire - actuellement à l'Université de Nîmes -, mais un laboratoire propre à DAC ADN est en cours d'implantation à Tresques (30), là où se trouvent les bureaux.
Plusieurs services sont ensuite disponibles, entre une offre 'Premium' garantissant un accompagnement personnalisé avec des bilans hebdomadaires et annuels, une offre 'Standard' avec les stations, les analyses et l'accès au modèle, et enfin une offre 'Réseau' avec l'accès au modèle uniquement, si tant est que des données soient disponibles dans la zone d'implantation de l'exploitation.
En dehors de la période de location, les capteurs retournent à Tresques pour la maintenance.
Grâce au recul offert par les données locales et le réseau en place depuis un peu plus d'un an, les frères Douillet ont par exemple été en mesure de proposer un modèle mildiou à sept jours lors de la journée portes ouvertes du domaine expérimental de la Chambre d'agriculture de Vaucluse, à Piolenc, qui avait lieu le 12 juillet. Une façon de montrer aux agriculteurs le fonctionnement des capteurs et les possibilités d'adaptation de la stratégie phytosanitaire selon la probabilité d'infection.
Mais pas question de se cantonner au mildiou et à oïdium. Le capteur détecte tout, aussi bien le pollen que le black-rot. Jusqu'ici, les données n'étaient simplement pas exploitées directement pour les modèles, mais dans un programme de R&D en laboratoire. "Les agriculteurs ont souvent des mélanges de produits pour plusieurs pathogènes lorsqu'ils traitent. Intégrer les données black-rot, c'est leur offrir la possibilité de bénéficier d'un modèle généraliste et complet pour les aider dans leur réflexion", souligne Antonin Douillet. Bien sûr, il le reconnaît : "Ceux qui se lancent dans ce type de service sont souvent déjà sensibilisé à l'intérêt de la modélisation. Là, on leur propose d'ouvrir leur outil d'aide à la décision au-delà des données météo." Il est donc question d'aller à la rencontre de ces utilisateurs. Pour ouvrir l'offre de suivi épidémique et avancer sur le projet black-rot - par ailleurs soutenu par la BPI -, les frères ont recruté Baptiste Caffarel, étudiant à l'Institut Agro Montpellier. L'équipe espère pouvoir l'intégrer à la modélisation d'ici 2026.
Un support digital pour partager les résultats est également en cours de développement, afin de permettre un dialogue régulier avec les partenaires, et de fait, pouvoir proposer un modèle actualisé en consultation directe.
Amendement
Le dérèglement climatique impacte les plantes, mais aussi et surtout le sol et ses mécanismes élémentaires. Pour le laboratoire Terra Mea, la survie du vignoble dépend directement de son état.
Pour Guillaume Desperrières, directeur technique du laboratoire Terra Mea, "il y a un ancien système qui est en train de lâcher et il y a beaucoup de choses à remettre en question, sur le travail du sol, la couverture végétale, les cépages et les porte-greffes".
© Crédit photo : Yann Hartois
Inquiétant de voir que les vignes lâchent au beau milieu des vendanges. Malheureusement, l'année 2023 fait partie de tous les records négatifs en termes de sécheresse même si, en prenant un peu de recul, cela fait maintenant trois hivers consécutifs que les recharges des sols sont à sec. "Les recharges de 2022 ont été correctes et ont permis un beau millésime mais depuis, on se retrouve avec des hivers parfaitement secs, sans aucune réserve", constate Guillaume Desperrières, directeur technique du laboratoire Terra Mea à Montredon-des-Corbières, dans l'Aude. Depuis sa création en 2023, le laboratoire se penche sur l'analyse fine du sol, là où les interactions invisibles à l'œil nu façonnent celles qui le sont pourtant bien.
En 2024, il y a eu un semblant d'espoir, avec des épisodes pluvieux amenant quelque 150 millimètres de pluviométrie, et parfois même jus- qu'à 250 selon les secteurs. "Cela a permis aux vignes de mieux pousser, mais une fois que les sols se sont asséchés, on se retrouve dans une si- tuation où le vignoble décroche complètement".
Flétrissement, chute de rendement inédit, pour le directeur, "il y a quelque chose de rompu". Mauvaise récolte donc, à mettre sur le compte du manque d'eau, des mauvaises conditions d'inflorescence, mais aussi d'une activité microbiologique affaiblie, tant sur la minéralisation que sur la séquestration de carbone et donc de matière organique. "On est en perfusion la plus complète quand quelques gouttes tombent."
Retrouver des sols vivants, tel est l'enjeu du siècle. Pour Guillaume Desperrières, "la seule façon de gagner en résilience sur ces aspects climatiques est d'avoir un taux de matière organique important". Aujourd'hui, même sur des sols relativement argileux qui devraient être en capacité de stocker du carbone, le secteur se retrouve à des niveaux trop faibles quand on le compare au niveau national. "Nos sols sont majoritairement situés entre 0,5 et 2 % de matière organique, ce sont des niveaux extrêmement faibles qui n'offrent pas la capacité de résilience nécessaire." Mauvaise infiltration de l'eau, structure de sol moindre, microporosité inexistante, érosion galopante... Le sol, pourtant plein de vie au départ, est presque devenu un support inerte.
Dans un premier temps, l'objectif est de redémarrer la machine avec des apports exogènes de matières organiques. Oui mais lesquelles ? Dans l'immédiat, deux types, les matières organiques stables, riches en carbone et les matières organiques libres à minéralisation rapide et là-dessus, les sources ne manquent pas : le compost de déchets verts, disponible et pas cher, le compost de marc, riche en potassium, les matières organiques issues des agrofournisseurs sous forme de granulés, onéreux, mais avec des équilibres précis, le bois raméal fragmenté (BRF) avec un rapport C/N élevé qu'il faut diluer avec des matières organiques plus libres, et enfin le biochar, carbone pur qui permettrait de mieux capter l'eau... Finalement quel que soit le type de matière organique, "l'idée c'est de piloter finement les apports en fonction de l'équilibre des sols et de leurs typologies qui peuvent être très différents en fonction des secteurs". Autre source moins abordée, la réutilisation des boues de stations d'épuration est également un facteur clé pour relever le taux de matière organique. Le directeur partage sa conviction personnelle : "Le jour où on comprendra que ce qui va nous sauver au niveau du fonctionnement des sols est la matière organique, tout le monde voudra faire des apports, mais il n'y aura jamais assez de granulés ou de compost pour tout le monde. Le seul moyen d'avoir cette autonomie, c'est d'utiliser nos propres déchets." Le seul bémol de cette pratique réside dans la fraction médicamenteuse possiblement présente. Mais comme le rappelle le directeur, "quand c'est maîtrisé cela ne pose aucun souci". Les apports jouent donc un rôle, mais ils ne sont pas les seuls. L'autre partie fondamentale reste la couverture des sols. "C'est une priorité même si cela est délicat dans les conditions méridionales, du moins en période automnale et hivernale. Mais encore faut-il qu'il y ait assez de pluie et que les couverts soient gérés intelligemment pour ne pas entraver le fonctionnement de la vigne, qui reste le plus gros risque."
Là où le sol a beaucoup de mal à fonctionner, l'application d'engrais foliaire reste une piste intéressante sur du court terme. "La vigne est une plante qui reçoit bien les éléments minéraux par voie foliaire, mais cela reste un coup de pouce et on ne corrigera jamais de façon pérenne et certaine les déséquilibres par ce type d'apport." Certaines parcelles tests ont permis de constater une amélioration du fonctionnement, notamment par l'apport des engrais classiques NPK (azote, phosphore et potassium), mais aussi sur des oligoéléments comme le fer et le manganèse, qui ont eu "des effets remarquables là où les parcelles étaient en déficit".
Cette année, le laboratoire a également réalisé des tests sur l'apport de zinc, avec des résultats qui montrent un regain de productivité, sur grenache notamment. D'autres essais, concernant la fertirrigation ont montré des choses intéressantes : "Les apports de phosphore en fertirrigation sur sols calcaires n'ont montré que peu de résultats, alors que pour d'autres éléments, les résultats sont flagrants." Solution au cas par cas donc, loin des généralités. Constat certain et unanime, les chloroses ferriques, visibles de façon récurrentes dans la région languedocienne sur des parcelles argilo-calcaires, peuvent se corriger avec des apports de fer, "du moins sur le court terme".
Pour cibler au mieux ces éléments, entrent en jeu les analyses pétiolaires - réalisées dès le début du printemps, respectivement au stade boutons floraux séparés, taille de bois et à la véraison - permettant ainsi de voir l'évolution de l'assimilation. Pour les bois, les prélèvements sont effectués de décembre à février. "Les mises en réserve dans les bois permettent de voir ce qu'il s'est passé en fin de cycle et en fonction, on sait comment va se passer le débourrement. À quatre ou cinq feuilles de l'année d'après, on sait qu'il y aura un manque de manganèse, de magnésium..., et donc on fait des apports précoces. Plus on prend tôt les déficits, plus c'est facile à corriger."
Quand on prend du recul, l'évolution du vignoble reste très hétérogène. La vigne souffre sur la bande littorale avec l'assurance que le nouveau millésime sera dur. En revanche, quand on regarde vers les départements voisins, c'est l'effet inverse. "L'excès de pluie a eu des impacts mildiou importants et donc le comportement est différent."
Une chose est certaine, les sols décrochent et certains matériels lâchent également. "On a un vrai besoin de restructurer et de savoir ce qu'on va bien pouvoir planter, car les leviers d'adaptations sont là et malgré tout, il y a des vignes qui tiennent le coup. Il suffit d'utiliser les outils que nous avons en notre possession."
L'analyse 3-Biom est une méthode rapide et précise, développée par le service R&D de Terra Mea, pour mesurer le vivant du sol. Elle utilise une technologie innovante de cytométrie haute définition, exclusive et brevetée, permettant de mesurer directement les champignons, bactéries et protistes présents dans le sol. Cette approche distingue les cellules en trois états : vivantes actives, métaboliquement inactives (en dormance), et mortes. Cela offre une image détaillée de la microbiologie du sol, essentielle pour évaluer sa santé et son efficacité à soutenir la production agricole. En résumé, l'analyse 3-Biom permet de mieux comprendre et optimiser le rôle biologique du sol dans le cadre de la transition agroécologique.
traitements phytosanitaires
Dans le cadre de la réglementation sur les Distances de sécurité vis-à-vis des personnes présentes et des riverains, il peut être intéressant d'avoir recours à des techniques permettant la réduction de la dérive. Dans ce cadre, haies et filets présentent un intérêt.
L'Institut français de la vigne et du vin a démontré l'intérêt des haies et des filets installés en bordure de parcelles pour réduire la dérive de pulvérisation.
© Crédit photo : CZ
Ce n'est pas faute de relayer chaque année le message et d'appeler à régler son pulvérisateur régulièrement. Les traitements phytosanitaires sont en effet un des leviers majeurs pour protéger sa récolte, l'année 2024 et son extraordinaire pression mildiou venant une nouvelle fois le rappeler.
Certes, il faut pouvoir entrer dans la parcelle, ce qui n'est pas toujours évident si les sols sont gorgés d'eau et mal ressuyés. Mais une fois dedans, il faut optimiser au maximum le travail du pulvérisateur, avec le bon débit de chantier, le bon volume de bouillie, des buses propres et qui touchent leur cible, tout en limitant la dérive pour la protection de l'environnement.
Le travail réalisé sur le sujet par l'Institut français de la vigne et du vin (IFV) n'est pas récent et s'est notamment ponctué par la création du banc d'essai EoleDrift, en partenariat avec Inrae : ce dernier permet d'évaluer les performances des pulvérisateurs viticoles (www.performancepulve.fr), des techniques de pulvérisation, mais aussi des aménagements parcellaires susceptibles de réduire la dérive et les pollutions diffuses qu'elle génère.
Parmi les dispositifs étudiés en 2022 et 2023 : l'implantation de haies arbustives ou de filets de type brise-vent, situés à l'interface entre la parcelle traitée et la zone sensible.
Les résultats compilés de ces deux années de travaux sont plus qu'encourageants : ils confirment en effet l'intérêt des barrières physiques qui permettent une réduction significative de la dérive.
Deux types de barrières physiques ont été mis à l'essai : une haie vive reconstituée sur le banc d'essai avec des plants de laurier-sauce en pot, alignés les uns à la suite des autres, et d'une hauteur moyenne de 2,5 mètres ; et un filet brise-vent en matière plastique 'bv 106', d'une hauteur de 3 m fourni par la société FilPack. Les deux barrières physiques étaient installées à 2,5 m du dernier rang traité.
Pour chacun de ces types de barrière physique, les mesures de dérive ont été effectuées pour deux techniques de pulvérisation distinctes - une voûte pneumatique et un pulvérisateur face par face avec descentes à jet porté - comparées à une référence (voûte pneumatique).
En moyenne, sur l'ensemble de la hauteur des profils mesurés, la haie d'étude a permis une réduction de la dérive de 74 % et le filet artificiel 85 % soit une réduction de dérive d'un facteur 5 à 6,6 respectivement. Quant à la dérive sédimentaire, intéressante au regard de l'exposition des riverains, elle est réduite de 84 à 96 % en présence de filets.
Combiner ces dernières avec un matériel de pulvérisation performant permet d'atteindre des taux de réduction supérieurs à 95 %. En cette année 2024, l'ergonomie de la plateforme a été d'être revue faciliter la consultation des modèles et variantes et compléter ces résultats.
À noter enfin que l'ensemble des données obtenues dans le cadre de ces expérimentations sont transmises aux agences sanitaires en charge de la gestion des risques liés à l'utilisation des produits phytosanitaires, donnant ainsi des clés aux vignerons sur les outils techniques de réduction de la dérive, dans le cadre notamment de la réglementation sur les Distances de sécurité vis-à-vis des personnes présentes et des riverains, les fameuses DSPPR.
Les CHIFFRES clés-
Terra Vitis
Depuis un quart de siècle, des vignerons qui testaient des pratiques novatrices se sont associés pour valoriser leurs démarches à travers une certification. Ainsi est née Terra Vitis, qui rassemble plus de 1 300 vignerons dans le Sud de la France.
Romain Frayssinet, du Moulin de Lène, Bruno Dura, de la cave Néotera et président de Terra Vitis Rhône-Méditerranée, Morgane Le Breton, du Domaine de la Jasse, Anne-Laure Ferroir, directrice de la Fédération nationale Terra Vitis, Charles Duby, du Domaine de l'Arjolle et Lorie Chavida, animatrice de la fédération Rhône-Méditerranée.
© Crédit photo : MS
Née il y a plus de 25 ans en Beaujolais, la démarche Terra Vitis rassemble des groupes de viticulteurs, dans tous les bassins de France, et "accompagne tous les acteurs de la vigne au verre, vers une viticulture plus durable et responsable", rappelle le président de la fédération régionale Rhône-Méditerranée, Bruno Dura, également président de la cave Néotera, à Ouveillan (11). "Notre vision globale s'enrichit des expériences de chacun, pour rester toujours pragmatique, mais également inspirante et visionnaire."
Ce sont les viticulteurs qui définissent et font évoluer le cahier des charges, son respect étant garanti par des contrôles annuels, ce qui n'est pas le cas de la Haute valeur environnementale (HVE) notamment, dont la mention est attribuée pour trois ans. 12 % du vignoble languedocien est engagé dans la démarche, 5 % en Provence.
"Avec la HVE, vous avez une obligation de résultat, alors qu'avec Terra Vitis vous avez plutôt une obligation de moyens", explique Charles Duby, ancien président de la fédération régionale. 99 % des exigences du cahier des charges sont les mêmes d'une région à l'autre, si ce n'est l'irrigation, spécifique à la fédération Rhône Méditerranée. "C'est une démarche qui est sincère", complète Romain Frayssinet qui, avant de reprendre la société éponyme de fertilisants organiques devenue Ethicae, a fait ses armes en dirigeant le domaine familial du Moulin de Lène, à Magalas (34). Voisin de Charles Duby, c'est ainsi que la contagion Terra Vitis s'est propagée. "Aujourd'hui, on parle beaucoup de RSE [responsabilité sociétale des entreprises, ndlr], mais les Terra Vitis le font depuis 25 ans", poursuit Romain Frayssinet.
Selon les affinités des uns et des autres, certains viticulteurs du groupe sont en pointe sur la biodiversité, d'autres sur les contenants novateurs, en verre allégé, le recyclage ; d'autres encore se penchent plus particulièrement sur les questions de bien-être au travail ; et l'ensemble du groupe bénéficie des avancées des uns et des autres. Certaines problématiques impactent plusieurs dimensions, comme le poids des bouteilles sur lequel a beaucoup travaillé Morgane Le Breton, du Domaine de la Jasse, à Combaillaux (34). 50 % de l'empreinte carbone d'une bouteille est liée à son packaging. Ainsi, avec l'appui de son verrier, elle est passée d'une bouteille de 600 g à 400 g aujourd'hui, ce qui impacte les frais d'expédition, ainsi que les conditions de travail lors de la mise en cartons. En revanche, cela ne permet pas le réemploi, car la bouteille ne doit pas passer en dessous de 500 g pour éviter la casse.
Exit au domaine également les capsules : "Il n'y a pas d'obligation légale, on peut déclarer la Marianne autrement. Cela a été un peu compliqué pour trouver l'alternative administrative. On appréhendait un peu la réaction du consommateur, mais il ne se rend pas forcément compte du changement." Au final, "Terra Vitis c'est un gage de qualité, ce n'est pas un argument de vente", souligne Morgane Le Breton.
La démarche s'intègre dans un discours commercial, étoffe un argumentaire, en permettant au vigneron de s'appuyer sur une certification. Charles Duby, à la retraite, continue d'épauler les six associés du Domaine de l'Arjolle, à Pouzolles (34), qui exploite 107 hectares de vignes et emploie 16 salariés permanents. 60 % des ventes se font à l'export, aussi ont-ils lancé une gamme en canettes, qui fonctionne très bien avec les pays anglo-saxons. Le reste des ventes se fait en direct. "On ne passe pas par la grande distribution, à quelques exceptions près en local." Ils ont planté des cépages peu courants dans la région, comme le zinfandel, qui vient du sud de l'Italie, ou le carménère de la région bordelaise. "On teste aussi le C9, qui n'a pas encore de nom, mais présente un intérêt significatif pour la région, car il garde à maturité un petit degré : au 20 sep- tembre, il était en dessous de 11°."
À une quarantaine de kilomètres de là, à la cave Néotera, "alors qu'on observe un désengagement sur l'agriculture biologique, nous restons stables sur Terra Vitis, qui a progressé de 10 % en quatre ans. Ceux qui sont partis de l'AB, y étaient venus pour des motivations économiques. Terra Vitis, c'est une vraie philosophie de travail", conclut Bruno Dura.
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