Diversification
En attente du soutien des banques pour la création de sa casserie dans le Var, la Compagnie des amandes a entamé sa 2e récolte. Des clients rejoignent l'aventure, et la Compagnie poursuit sa recherche d'agriculteurs ou propriétaires prêts à planter, ou de petits producteurs d'amandes pour compléter l'offre.
Le verger d'une centaine d'hectares implanté à Sérignan-du-Comtat a entamé, en 2024, sa 2e année de récolte.
© Crédit photo : MS
Rendez-vous était donné à Sérignan-du-Comtat, au Domaine de la Renjardière, pour la deuxième récolte de l'un des plus importants vergers d'amandiers de la Compagnie des amandes, rassemblant près d'une centaine d'hectares. Le verger sert également de référence pour le suivi technique, notamment sur les types de conduite. Les arbres les plus âgés sont en 4e feuille. À côté de ces plantations à densité plus faible, une partie a été implantée en haie fruitière. Pas question de trancher pour l'une ou l'autre des solutions, "mais de pouvoir conseiller un type d'implantation en fonction des variétés, de la typologie de la parcelle, et des capacités d'investissement", souligne Rémy Foissey, le directeur technique. Des expérimentations sont également conduites avec Inrae, notamment pour trouver des solutions alternatives pour lutter contre les principaux ravageurs et maladies de l'amandier. Parmi ceux-ci, la guêpe de l'amande, Eurytoma amygdali, responsable de pertes de rendement pouvant s'élever jusqu'à 80 %. "Pendant deux ans, une doctorante a travaillé sur des molécules qui pourraient avoir un effet répulsif pour la mouche", explique Rémy Foissey. En effet, la mouche laisse, via son abdomen, des composés volatiles, qui indiquent aux autres mouches qu'elle a déjà pondu dans une amande. L'idée est de simuler le passage d'une mouche pour que les autres ne viennent pas pondre. Les expérimentations sur la question se poursuivent. Si une première implantation de verger bio a eu lieu dans l'Aude, à terme, une partie croissante des cultures devrait être convertie en bio, sous réserve de la validation de la pertinence agronomique et économique des projets.
Invités le 6 septembre, partenaires et clients sont venus déguster des amandes et découvrir une démonstration de récolte avec une corolle. Quatre hectares peuvent ainsi être récoltés en une journée.
Arnaud Montebourg, son président, rappelle le concept novateur en agriculture de la Compagnie des amandes qu'il a créée avec François Moulias, directeur général : "Nous avons décidé de ne pas acheter la terre, de la laisser en propriété aux agriculteurs, car la propriété doit rester à celui qui l'exploite".
Autre point important : l'agriculteur reçoit une rémunération dès la plantation, avant l'entrée en production. "Nous créons ensemble des sociétés d'exploitation qui plantent les arbres, installent l'irrigation, cultivent et récoltent." Pernes-les-Fontaines, Aix-en-Provence, Mèze, Carcassonne... 210 hectares ont déjà été plantés, et ne sont pas tous encore en production, 100 ha de plus devraient voir le jour l'an prochain, 310 ha ont été actés et 500 ha sont en cours d'instruction. Le partenariat signé avec Arterris devrait notamment contribuer au déploiement des surfaces. "Nous avons élargi les propositions au producteur", souligne Arnaud Montebourg. "Si le producteur ne souhaite pas s'associer, on peut aussi casser et commercialiser."
Présente ce jour-là, l'une des clientes engagée dans la démarche met en avant la possibilité d'achat de volumes correspondant à ses besoins.
Marie-Claude Stoffel, des nougats Chabert et Guillot à Montélimar, produit 2 000 tonnes de nougats par an. "Nous allons récupérer le mois prochain nos deux tonnes d'amandes", suite à l'accord signé l'an passé. Avec ces amandes, elle souhaite créer une gamme spécifique 100 % française, "car tous nos consommateurs ne sont pas prêts à comprendre une hausse de prix générale sur nos nougats". En France, on consomme 45 000 t et, a priori l'offre française ne dépassera pas les 10 %, se plaçant sur le segment premium. "Nous sommes présents en distribution, mais nous comptons nous développer sur la transformation", détaille François Moulias. "Nous sommes en discussion avec de gros faiseurs (fabricants de calissons, nougatiers...), mais aussi dans le domaine de la boisson. L'autre versant est la cosmétique, où nous discutons avec de grands noms de la profession." Après avoir réalisé 175 000 euros de chiffre d'affaires en 2023, la Compagnie des amandes prévoit de quadrupler ce chiffre et de faire, enfin l'an prochain, les premiers bénéfices. "Nous voulons rémunérer et dérisquer les agriculteurs sur les débouchés." Pour mémoire, en 1948, la Provence comptait 12 000 ha d'amandiers. Après le gel de 1956, les amandiers n'ont pas été replantés par manque de débouchés. "À l'époque, les femmes étaient payées en coque d'amandes qu'elles devaient vendre comme allume-feu...," rappelle François Moulias. Pour assurer son développement en attendant de nouvelles plantations, la Compagnie des amandes souhaite agréger l'offre existante. "Aujourd'hui, un peu plus de 1 000 agriculteurs ont des amandiers, ce qui fait un peu plus de 2 hectares en moyenne. Ce n'est pas suffisant pour intéresser des transformateurs." Quant au projet de casserie à Signes dans le Var, la Compagnie des amandes attend toujours le feu vert des banquiers, qu'elle espère avoir incessamment sous peu. "Nous offrons une fonctionnalité qu'aucune casserie ne garantit pour l'instant : qu'il n'y ait pas plus de 0,01 % de corps étrangers." En attendant la pose de la première pierre, la Compagnie des amandes teste le process en louant la ligne de casse qui équipera l'usine. "Le projet est calibré pour atteindre les 3 000 tonnes d'amandes, mais le seuil de rentabilité est bien plus bas. On devrait faire un peu plus de la moitié." Et pour ceux qui voudraient goûter les amandes : dans un mois, "nous mettrons en vente sur notre site internet des sachets d'un kilo".
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