PACA, Occitanie 07/11/2024
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Venaison

Se nourrir des produits du territoire

La Fédération nationale de la chasse souhaite structurer la filière du gibier sauvage. Elle s'attaque pour cela aux freins réglementaires ou logistiques qui ne permettent pas, ou très peu, de valoriser cette ressource dans les territoires.

La Fédération nationale des chasseurs a engagé plusieurs chantiers pour faire sauter les verrous empêchant la filière venaison de se développer.

© Crédit photo : Getty Images/iStockphoto - Michel VIARD

En France, les quantités de gros gibiers prélevés, surtout dans les départements du Nord-Est, sont très importantes. Plutôt que d'importer du gibier en provenance des pays de l'Est, pourquoi ne pas le valoriser chez nous ? L'idée semble logique et pertinente d'un point de vue économique et environnemental. C'est en tout cas la volonté de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) de bâtir une filière autour de la venaison.

"Le développement de la filière venaison constitue un enjeu important pour le monde de la chasse", a expliqué fin septembre Nicolas Rivet, le président de la FNC. "Depuis 50 ans, les tableaux de chasse ont explosé et certains, notamment agriculteurs ou encore forestiers privés, nous demandent de prélever plus. Or, de nombreuses sociétés de chasse sont aujourd'hui dans l'incapacité d'absorber des volumes supplémentaires", poursuit-il. "Tout simplement parce que leurs congélateurs sont pleins !"

Forte du constat de la grande quantité d'animaux prélevés et des besoins des consommateurs sur la viande de gibier, à l'occasion des fêtes notamment, la FNC a engagé plusieurs chantiers pour faire sauter les verrous empêchant la filière venaison de se développer.

"Un verrou réglementaire"

"Le premier est réglementaire", explique Olivier Touchard, chargé de mission 'venaison' de la FNC. "Nous accompagnons une expérimentation qui autorise, sur une quinzaine de territoires et pour un an, la découpe préalable en six morceaux de la viande de grand gibier par les chasseurs, conformément à un arrêté publié le 1er août dernier." Recommandée par un rapport du CGAAER (ministère de l'Agriculture) sur la venaison, en 2021, l'initiative vise à faciliter la vente en circuit court de la viande de gibier auprès des commerces de détail situés à moins de 80 kilomètres du territoire de chasse. "Nous avons veillé à ce que les chasseurs concernés soient formés, afin de pouvoir démontrer la qualité sanitaire des viandes commercialisées auprès de la DGAL et de la filière gibier", complète Olivier Touchard.

Mais passer de l'animal prélevé à la chasse en une viande consommable et commercialisable est loin d'être simple.

Traiter la venaison de manière distincte

"Récupérer les sangliers issus des battues dans leur intégralité - chair, poils et os inclus - pour les valoriser en daube, par exemple, nécessite tout un travail de collecte et de traitement des animaux. Si certains départements ont déjà bien avancé sur le sujet, il n'y a pas, pour le moment, de filière de venaison en Paca, faute de structure et d'outil en capacité de traiter le gibier de manière distincte de la viande d'élevage", rapporte Christel Savelli, directrice de la Fédération régionale des chasseurs de Paca. En région pourtant, la ressource est importante, avec des populations de gros gibier en augmentation, même si leur nombre tend à se stabiliser. "On ne peut pas parler d'explosion. Mais le prélèvement moyen de nombre de sangliers en région Paca sur ces cinq dernières années reste de l'ordre de 53 800 animaux par an. Tous ces animaux atterrissent aujourd'hui dans les assiettes des chasseurs, de celles de leurs familles et amis. Pouvoir transférer une partie de ce gibier - aujourd'hui valorisé individuellement - vers un système plus commercial est un réel enjeu", indique Christel Savelli.

Un complément budgétaire pour les fédérations

En région Occitanie, la valorisation de la viande de gibier n'est pas un nouveau sujet. Plusieurs fédérations départementales s'en sont saisies depuis plus d'une dizaine d'années notamment, avec la volonté de la collectivité Languedoc-Roussillon à l'époque. "Nous avons une filière très bien implantée dans les Pyrénées-Orientales, avec l'entreprise familiale Guasch, bien connue du monde agricole et principal abattoir sur Perpignan, qui l'a montée elle-même, en accord avec la Fédération départementale des chasseurs. Il y a aussi l'exemple de la Maison Conquet, qui travaille sur l'Aveyron et la Lozère", explique Karine Saint-Hilaire, directrice de la Fédération régionale des chasseurs d'Occitanie.

Si ces exemples fonctionnent grâce à des outils solides, déjà existants dans un territoire, ils ne sont pas forcément reproductibles partout. "Passer de la viande de gibier en abattoir exige déjà un agrément, l'implication des chasseurs, des chambres froides et des sociétés de chasse équipées. Il y a aussi la difficulté d'aller chercher les carcasses", ajoute la directrice de la fédération régionale.

Là où les modèles fonctionnent bien, l'intérêt reste relativement minime pour les sociétés de chasse, mais malgré tout pertinent pour boucler les budgets, sachant que les frais augmentent pour ces associations. "Il n'y a pas vraiment de profit. C'est plutôt un complément budgétaire pour payer les frais de vétérinaires, les plants et les droits de chasse, etc.", explique Karine Saint-Hilaire.

Mais certaines expériences conduites ailleurs en région Occitanie - autour de la collecte et du traitement de venaison de grand gi- bier - n'ont pas trouvé de concrétisation. "Ce n'est pas en raison d'un manque de ressources disponibles, mais plutôt à cause de la difficulté à structurer l'amont de la filière", indique Karine Saint-Hilaire.

Une régularité de ressource attendue par les métiers de bouche

La transformation de gros gibiers ne prétend pas concurrencer la filière des viandes d'élevage. "Nous ne sommes pas sur les mêmes produits. Et même si le potentiel est énorme, avec une ressource bien présente dans les plans de chasse, notre difficulté est qu'à partir du moment où un animal est abattu, il faut qu'il soit en chambre froide dans les deux heures", souligne Karine Saint-Hilaire.

Pouvoir commercialiser à des professionnels de la viande de gibier en conformité de la réglementation, et répondant aux exigences sanitaires, nécessite donc une organisation professionnelle en amont. Mais la réalité du terrain de la chasse - qui s'appuie sur des bénévoles et un monde associatif - est toute autre : "Pour valoriser aussi le gibier localement, les professionnels de restauration ou de la boucherie attendent également de la régularité sur la ressource. Or, ce n'est pas le cas. Ceux qui ont réussi à fonctionner pour l'instant, c'est en raison de leur positionnement, sur un outil existant et sur du complément", résume la directrice.

Sa fédération régionale travaille étroitement avec la FNC dans cet objectif de pouvoir déployer des filières. "Fournir de la venaison, ça fonctionne très bien par endroits, mais il n'y a pas de recette clé en main. Ces filières auront des formats très différents d'un département à un autre, voire d'un territoire à un autre", reconnaît Karine Saint-Hilaire.

Avec l'indéniable abondance des prélèvements d'un côté, et une vraie demande des consommateurs de l'autre, la filière française de la venaison a certainement de l'avenir. Mais tout est à construire.  

Emmanuel Delarue & Actuagri •

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