Mobilisation
Environ 2 500 personnes ont défilé dans les rues de Carcassonne, samedi 30 novembre, à l'appel du syndicat des vignerons de l'Aude, de la FDSEA et des Jeunes agriculteurs.
"Quand les restaurateurs me disent qu'ils font leur marge sur le vin et pas sur la nourriture, cela veut dire qu'ils font leur beurre sur ma production, alors que moi-même je n'en vis pas. Aujourd'hui, que le prix du vin stagne, alors que tout augmente, c'est un scandale", témoigne l'une des 2 500 manifestants samedi 30 novembre à Carcassonne.
© Crédit photo : JB
Ils sont venus de l'Aude, du Gard, de l'Hérault, du Gers et même des Landes pour dire "non à la mort de la viticulture méridionale". Réunis devant les jardins de la préfecture de Carcassonne, Loïc Escourrou, président des JA de l'Aude et Frédéric Rouanet, président du Syndicat des vignerons de l'Aude ont salué dans leur intervention la forte mobilisation, pendant que la ville était lourdement encerclée par les forces de l'ordre, venues aussi en nombre. "Comment donner envie à des jeunes de s'installer ? La transmission des exploitations agricoles est un enjeu majeur pour l'avenir de l'agriculture. Il est urgent que le gouvernement prenne conscience de ce qui se passe, car face à la mondialisation et aux crises alimentaires, la souveraineté alimentaire est une priorité absolue", a souligné Loïc Escourrou, en réclamant à la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, de simplifier les dispositifs d'installation, d'augmenter les aides financières et d'assurer un accompagnement personnalisé pour faciliter la transmission.
Parmi les revendications du jour, un fonds d'aides d'urgence visant à indemniser les vignerons les plus durement touchés, et 25 millions d'euros par an pendant trois ans pour les coopératives viticoles ont été demandés. "Nous demandons le dégrèvement automatique et généralisé de toutes les taxes foncières sur le non bâti des parcelles en vigne dans l'Aude et une enveloppe permettant une réelle prise en charge des cotisations sociales à hauteur de 3,5 millions d'euros et pas 500 000 comme vous l'avez annoncé vendredi", a déclamé le leader des vignerons à la ministre. Les représentants syndicaux ont appelé à une évolution de la réglementation de l'assurance agricole "pour prendre en compte les épisodes de gel et de sécheresse sans précédents que nous avons vécus", et une simplification des contrôles reste encore demandée, malgré les annonces de la ministre de l'Agriculture faites le matin même, et saluées par la FNSEA et les JA. Un an après la grande mobilisation des vignerons du Midi à Narbonne le 25 novembre 2023, ces derniers s'accordent à dire "que rien n'a changé".
"Malgré la plus petite récolte du siècle, malgré les multiples rencontres avec nos acheteurs, malgré la distillation de 3 millions d'hectolitres, malgré les 27 450 hectares de vigne qui vont s'arracher, le marché du vin est à l'arrêt et certains négociants sont en train de proposer les prix les plus irrespectueux, lamentables et inacceptables. Il a fallu pourtant s'adapter à tous leurs caprices auxquels seuls les vignerons français ont accepté de se soumettre, pendant que les vins importés se vendent sous nos yeux, sans qu'ils n'aient les mêmes règles. Produire du vin bio, du vin HVE, du vin Terra Vitis, tout cela nous coûte un pognon monstre pour voir nos vins se vendre aux prix où les carignans se vendaient à l'époque de nos grands-parents. Nous sommes devenus des esclaves au service du négoce qui se fout de notre gueule", a tempêté Frédéric Rouanet devant la foule de bonnets rouges et d'écharpes tricolores. "Sur un verre de vin à 8 € dans un restaurant, je touche 10 centimes. Et quand les restaurateurs me disent qu'ils font leur marge sur le vin et pas sur la nourriture, cela veut dire qu'ils font leur beurre sur ma production, alors que moi-même je n'en vis pas. Aujourd'hui, que le prix du vin stagne, alors que tout augmente, c'est un scandale", témoigne une viticultrice venue de l'Hérault.
Le chef de file des vignerons a une nouvelle fois pointé du doigt la loi Evin qui limite la publicité pour l'alcool, "alors que tous les jours nous voyons des publicités pour des boissons dégueulasses, hypercaloriques et dangereuses pour notre santé et celle de nos enfants. Nous sommes le seul pays dans le monde à autoriser la production d'un produit agricole tout en interdisant sa publicité. Comment ne pas comprendre que les clients se détournent du vin ? Les restaurateurs, en tant que défenseurs de notre patrimoine gastronomique, doivent être nos alliés, et ne pas participer, par des prix prohibitifs, à notre marginalisation. Et où est l'arbitre pour empêcher ces marges excessives ? Nous sommes véritablement laissés seuls face à dictature du pognon".
Le cortège, parti en retard dans l'attente de manifestants "encore bloqués par les forces de l'ordre", était suivi d'une quinzaine de tracteurs, malgré l'arrêté préfectoral interdisant leur circulation ce jour. En passant devant la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), dont le jardin était largement empli de CRS et d'un canon à eau, des manifestants encagoulés en ont secoué les grilles du portail et jeté des blocs de goudrons glanés sur place.
La réplique des CRS ne s'est pas fait attendre longtemps, des galets de gaz lacrymogènes ont été lancés en retour, touchant les manifestants de la fin du cortège et plusieurs photojournalistes. Aux alentours de 17 heures, la manifestation s'est terminée sur le square Gambetta de Carcassonne, où Thimoléon Resneau, président du syndicat des éleveurs de l'Aude (Selpa) - dont le slogan est "n'importons pas ce qu'on refuse d'élever en France" - a pris la parole pour dénoncer le traité de libre-échange du Mercosur. "L'élevage français est reconnu dans le monde pour sa qualité, et on vient faire bascule avec du commerce d'automobiles en échange de viande. Avec cet accord du Mercosur, on vient nous imposer une viande qu'on refuse de produire en France. À force d'être une colère, c'est une détresse, et nous sommes avec vous pour défendre l'agriculture française." À la nuit tombée, l'hélicoptère des forces de l'ordre suivait toujours la mobilisation et des nombreuses poubelles ont continué d'être embrasées.
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