France 21/09/2023
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Réseaux sociaux

Un bon terreau pour échanger, vendre, exister...

Formé à l'Université de Toulon, Laurent Scullino est consultant chez All Skills, qui propose de l'accompagnement dans la mise en place de projets digitaux. En suivant quelques règles simples, les agriculteurs peuvent trouver leur place sur la toile. Le tout est de savoir ce qu'ils veulent en faire.

"Il n'y a aucune obligation à être présent sur les réseaux sociaux. La première question à se poser est : qu'est-ce que je veux en faire ?" , explique Laurent Scullino, consultant chez All Skills.

© Crédit photo : L.S.

Chaque année, l'enquête Agrinautes revient sur les usages du numérique par les agriculteurs. En 2022, 68 % des agriculteurs connectés utilisent les réseaux sociaux, un pourcentage sûrement supérieur à la réalité puisque l'enquête est réalisée sur Internet, et touche déjà des agriculteurs plutôt actifs.

Dans le monde actuel, l'agriculteur, peu importe sa filière, se doit-il d'être connecté ?

Laurent Scullino : "La première question à se poser est : que veux-je en faire ? Ai-je un message à faire passer ? Est-ce que je veux me faire connaître ? Créer une communauté ? Proposer un service ? Il n'y a pas d'intérêt à aller sur les réseaux sociaux simplement pour être connecté. Si vous n'avez rien à dire, si vous n'y faites rien, il ne se passera rien. Cela n'a aucun intérêt."

J'ai envie de me lancer, mais je ne fais ni vente directe, ni accueil à la ferme... Est-ce pertinent ?

L.S. : "Via les réseaux, on peut vendre, promouvoir, échanger, exister... Il n'y a pas que la vente et l'accueil du public qui peuvent y trouver un intérêt. On peut avoir un message à faire passer, quelque chose à expliquer, l'envie de parler de son métier.

Dans un monde connecté, si on veut exister, il faut aller sur les réseaux sociaux. Mais si on a déjà une bonne aura locale et pas besoin d'étendre sa clientèle, les réseaux sociaux ne sont pas forcément nécessaires. Un site avec les coordonnées peut être suffisant. Si, en revanche, on a besoin de développer sa clientèle, on peut utiliser les réseaux pour parler de ses produits, les montrer, raconter une histoire."

De manière générale, les réseaux sociaux ne sont pas les mêmes selon ce qu'on cherche à diffuser. Si les agriculteurs ne devaient en avoir que deux, lesquels privilégier ?

L.S. : "Il est difficile de n'en choisir que deux, mais pour moi ce serait Facebook et Linkedin. Facebook, parce qu'il y a un large auditoire. 50 % des entreprises y sont présentes. Cela fait un bon terreau. Il y a une grande variété de contacts et du volume en matière de prospection. Linkedin est plus professionnel. Si on a une innovation, c'est le bon réseau pour la mettre en avant. Linkedin a évolué ces dernières années et devient de plus en plus un outil conversationnel. On peut trouver de nouveaux fournisseurs, découvrir de nouvelles solutions, passer des messages."

Quelles sont les clés pour se lancer dans les réseaux sociaux  ?

L.S. : "Les clés, c'est d'avoir une histoire à raconter, de la régularité dans les posts, de la cohérence et de la variété, pour que l'auditoire ne se lasse pas. Bien entendu, l'image retiendra l'attention : c'est un vecteur d'émotion. Pensez également à soigner vos accroches, les trois premières lignes. Sur Facebook, vous pouvez miser sur les publications qui incitent à la réaction, avec des messages courts, de l'humour. En agriculture, Instagram - lié à Facebook puisque propriété de Meta - peut être un bon support pour partager photos et vidéos. Tous les utilisateurs de Facebook ont un compte Instagram qu'ils n'ont pas forcément activé. C'est un public similaire à celui de Facebook, mais plus snacker. Ils consomment de l'image, et passent à la suivante."

Que faire face au syndrome de la page blanche ?

L.S. : "Si vous manquez d'inspiration, n'hésitez pas à aller voir ce qui se fait ailleurs, et pas seulement en agriculture. Restez simple. Communiquez sur ce que vous connaissez : votre métier. Si vous manquez de créativité, misez sur l'authenticité et la spontanéité. Un post par semaine, c'est déjà bien. Mais faire un post chaque jour, ce n'est pas très compliqué. Il faut aussi développer son réseau, inviter des gens, répondre aux interactions et s'organiser, en programmant des posts à l'avance par exemple."

Avoir des réseaux sociaux - ou ne serait-ce qu'un seul - prend souvent du temps si on veut développer une communauté et être visible. Comment concilier leur utilisation aux journées de travail, sans grignoter sur le temps personnel ?

L.S. : "Il est impératif de prévoir du temps à consacrer aux réseaux sociaux. Si on fait un post, puis un autre deux mois plus tard... il ne faut pas s'étonner que cela ne fonctionne pas. Lorsqu'on a un métier de terrain, il faut penser à prendre des photos dans la journée, voire quelques notes... On peut prévoir chaque matin un petit moment pour faire un post, et le soir un autre moment pour la préparation : programmer ses prochaines parutions, répondre aux commentaires, se connecter avec d'autres utilisateurs. Des photos dans le flux de travail quotidien, ça va fonctionner. Il ne faut pas oublier de répondre aux gens qui interagissent avec vous : les réseaux sociaux, c'est avant tout de l'échange. On peut aussi s'appuyer sur l'intelligence artificielle : ChatGPT ou sa nouvelle concurrente, Claude, bientôt accessible en France. Si l'on respecte quelques règles - et notamment le fait de ne pas y inscrire de données sensibles - ce peut être un allié pour résumer un texte, le reformuler. C'est un agent conversationnel. Vous l'interrogez comme vous m'interrogeriez moi, mais avec une rapidité d'exécution décuplée. Il peut vous proposer dix posts en quelques secondes. Mais attention, il faut relire !"

Alors que l'incompréhension règne souvent autour du métier d'agriculteur, comment se protège-t-on sur les réseaux sociaux ?

L.S. : "Il n'y a pas de solution miracle. Si on a une prise de position forte, il faudra tenir, proposer des contre-arguments et, surtout, expliquer. S'il y a de fausses allégations, il faut expliquer et démontrer : non je n'utilise pas tel produit, pour faire cela, je fais ainsi... Ou alors il faudra expliquer pourquoi : oui je fais ainsi, parce que cela permet de faire ci, ou ça...On se dévoile forcément un peu en allant sur les réseaux. Après, si un internaute est trop envahissant, vous avez toujours la possibilité de le bloquer. Vous acceptez des abonnés, comme vous pouvez les exclure, si les explications ne donnent rien."

Et pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas s'y mettre, quelles sont les possibilités pour communiquer ?

L.S. :"Tout dépend de ce que l'on veut faire. Mais en effet, si l'on souhaite être présent sur les réseaux sociaux, il est possible de se faire accompagner. Il y a des centaines de prestataires. Vous pourrez vous adresser à une agence : vous aurez un chef de projet qui vous proposera une stratégie pour booster vos posts, de la création de contenu, vérifiera les statistiques... Il faut compter entre 500 et 3 000 euros par mois. Il y a également des free-lances, des pépites comme je les appelle, qui se sont mis à leur compte. C'est peut-être là où vous trouverez les meilleurs. Là vous serez dans les 350 à 500 euros par jour, le calcul se fera au temps passé, avec un découpage en heure. Si vous n'avez pas le temps ou pas l'envie, il y a des solutions, si vous avez un budget." 

Magali Sagnes •

LE palmarès-

Les dix réseaux sociaux les plus utilisés en France

© Crédit photo : Pixabay

1. Facebook (73,3 %)

2. WhatsApp (59,8 %)

3. Instagram (58,6 %)

4. Messenger (57,8 %)

5. Snapchat (44 %)

6. TikTok (37,6 %)

7. Twitter (30,9 %)

8. Pinterest (28,1 %)

9. iMessage (24,8 %)

10. Linkedin (23,8 %)

Magali Sagnes •

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