Joël Nadal a développé un savoir-faire agricole unique. Passionné depuis toujours par les produits de la mer mais aussi par ceux de la campagne, ce Martégal s'est lancé dans la culture de champignons. Soudeur de métier, il a travaillé toute sa vie dans l'industrie pétrolière. Pour échapper aux vapeurs polluantes inhérentes à sa profession, il a cherché à renouer avec la nature. "Mes parents ont toujours eu des terres à la campagne, et faire pousser des graines, cueillir de champignons a toujours fait partie de ma vie", explique-t-il. À 46 ans il décide donc de tout plaquer, en quête d'un nouveau métier alliant "qualité, proximité et durabilité".

Pour sa reconversion professionnelle, il songe un temps aux agrumes. Mais le lopin de terre qu'il possède, du côté de Sénas, est trop exposé au vent. Alors pourquoi pas les champignons ? Le potentiel de ce terroir, proche de la Durance, et qui bénéficie d'un climat frais et assez humide, semble tout fait adapté.

Détermination, formation et débrouille

Le voilà parti à la recherche de ce qui concerne cette culture ancestrale. Il apprend tout sur le mycélium - l'appareil végétatif des champignons - et dévore tout ce qui peut le guider dans cette nouvelle aventure. Les conseils de YouTube et les livres ne suffisant pas, il suit plusieurs formations aux côtés d'experts en microbiologie et en agriculture.

Son nouveau défi, il le relève avec beaucoup de débrouille dans la cave de ses parents, à Martigues, où il réalise ses ensemencements sur ballots de paille ou copeaux de bois, et récolte ses variétés. "Dès le début, j'ai su que les champignons allaient faire partie de ma vie", rapporte-t-il. Les premiers essais culturaux ne sont pas tous concluants. Mais c'est justement ce qui lui permet d'avancer dans son apprentissage.

Culture complexe et fragile

"La culture du champignon est très complexe. Le développement du mycélium est fragile, et la moindre erreur peut produire un micro-organisme, provoquer une contamination et détruire la culture", explique Joël. L'installation de son premier atelier de fortune exigeait donc certaines contraintes techniques, car "le champignon a besoin de d'une température précise - contrôlée avec un thermomètre -, d'un brumisateur - pour créer l'humidité nécessaire -, de la lumière et aussi un système de ventilation, pour ajuster la concentration en CO₂", argumente-t-il.

Petit à petit, la culture des champignons devient une évidence pour lui. Pholiote du peuplier, pleurote de panicaut, pleurote pulmonaire ou encore pleurote rose, Joël les fait pousser de manière artisanale et maîtrise aujourd'hui la plupart des techniques.

Sa démarche va bien au-delà de la culture : son objectif est de travailler avec les acteurs locaux et les agriculteurs du territoire, en circuit court. Le substrat sur lequel poussent les champignons, par exemple, est constitué de déchets végétaux recyclés, comme de la paille pour les pleurotes ou de la sciure pour la pholiote du peuplier. Et il n'hésite pas à solliciter les agriculteurs proches du site où il va s'implanter sur Sénas, pour se procurer ces matières premières et faire fructifier le blanc de champignon, une véritable solution écologique innovante : "Ces organismes fascinants transforment des déchets organiques (sciure, marc de café, copeaux de bois, etc.) en nutriments précieux, notamment nos déchets, tout en créant une source alimentaire durable. La culture en intérieur m'a permis d'observer ce processus circulaire où rien n'est gaspillé et tout est réutilisé", explique le producteur.

Vrai succès sur les marchés

Il commence à vendre sur les marchés de plein air du département avec une sélection riche et variée proposée à une clientèle qu'il construit petit à petit. Sur les marchés de Sénas, Istres, Sausset-les-Pins ou Saint-Rémy-de-Provence, les retours sont très positifs. Il faut dire que Joël propose des dégustations de velouté sur place, un moyen imparable pour "réconcilier des préférences alimentaires variées, comme celles des végétariens et des amateurs de viande, autour de plats savoureux et communs".

Joël Nadal entend aussi solliciter les restaurateurs. Certains lui ont déjà fait savoir qu'ils appréciaient la saveur et texture surprenante de ses productions. "Les champignons apportent une richesse culinaire infinie, du goût noisette des pleurotes ou la pholiote, ils enrichissent les repas et inspirent de nouvelles recettes", argumente Joël, dont la seule motivation est de proposer des produits de grande qualité. Et il s'en donne les moyens !

Déménagement à Sénas

Aujourd'hui, il se sent privilégié de pouvoir partager cette passion avec son entourage, et de contribuer à un mode de vie plus respectueux de l'environnement. Le marché des champignons est en plein essor, porté par une prise de conscience collective de l'importance des produits locaux et naturels, et il se sent heureux d'y participer.

Il souhaite maintenant sortir de sa 'petite cuisine' afin d'installer un véritable outil de production. Dans son atelier à Martigues, l'espace très limité le contraint à multiplier les manipulations de ses supports de cultures. C'est sur Sénas qu'il a l'intention de passer la vitesse supérieure. Le terrain familial est déjà défriché, prêt pour accueillir un nouveau site de production. Il attend les autorisations pour y construire une cave, car "produire sous terre serait l'idéal", estime le producteur de champignons. 

Cotisant solidaire à la MSA, Joël Nadal a commencé à produire et à vendre ses champignons cette année.

Avec ses futures installations, il souhaite pouvoir produire environ 500 kg/mois de champignons.